Musée historique Lausanne
Place de la Cathédrale 4
1005 Lausanne
Roland Blaettler 2019
Abstraction faite du Musée du Château de Nyon, le Musée historique de Lausanne conserve le fonds céramique le plus nombreux dans le canton. Le plus complexe aussi du point de vue de l’histoire des collections, puisqu’il regroupe aujourd’hui non seulement les objets collectés dès la fin du XIXe siècle par l’Association du Vieux-Lausanne et ceux qui furent donnés ou acquis par le musée directement, mais également ceux qui proviennent de l’ancien Musée industriel et des différentes entités qui lui succédèrent.
Les quelque 520 objets que nous avons inventoriés se répartissent à égalité entre ces deux «canaux d’approvisionnement». Comme à l’accoutumée, nous avons retenu à peu près 75% des fonds. N’ont pas été inventoriés des objets modernes, de facture industrielle et d’origine étrangère. Les céramiques émanant du Musée industriel et des institutions qui lui succédèrent sont identifiables par leur numéro d’inventaire, en principe préfixé des lettres «AA.MI».
Relevons d’emblée qu’à l’instar de la plupart des institutions à vocation généraliste, le Musée historique de Lausanne n’a jamais eu vocation à développer particulièrement les fonds céramiques, contrairement, par exemple, à ce que l’on constate dans les domaines de l’argenterie et des étains lausannois. Il en va un peu différemment des collections héritées du Musée industriel et de ses successeurs. Dans ce contexte particulier des arts industriels ou décoratifs, la céramique constituait évidemment un champ qui ne pouvait être négligé. Elle fera donc l’objet d’une ébauche de politique d’acquisitions à plusieurs moments du développement historique: dans la phase initiale du Musée industriel, vers 1925 – probablement sous l’influence de Nora Gross – mais surtout dans les années 1935-1960, quand Edith Porret, la conservatrice du Musée d’art décoratif, tenta de développer, dans la mesure de ses modestes moyens budgétaires, la collection de céramique suisse, qu’elle fût contemporaine ou historique.
Aux sources du Musée historique: le Musée du Vieux-Lausanne
En janvier 1898, Charles Vuillermet (1849-1918), peintre, vice-président de la Commission fédérale des beaux-arts et féru d’histoire, notamment d’histoire locale, s’approcha des autorités lausannoises pour leur suggérer la création d’une «collection de vues, plans et autres objets concernant l’histoire de Lausanne» (cité dans Pavillon 1998, 9). Une Commission du Vieux-Lausanne fut constituée pour traiter de «tout ce qui est de nature à intéresser l’archéologie et l’histoire de Lausanne», et notamment de la protection des vestiges anciens menacés par le développement urbanistique de la cité. À côté de Vuillermet lui-même, la commission comptait parmi ses sept membres une personnalité qui allait jouer un rôle considérable dans le développement subséquent du projet: Albert Naef (1862-1936), archéologue et professeur à l’École des beaux-arts du Havre, qui deviendra archéologue cantonal en 1898 et conservateur du Musée historique, le futur Musée cantonal d’archéologie et d’histoire en 1914.
S’agissant du projet de collection historique que Vuillermet appelait de ses vœux, la commission s’orienta rapidement vers un concept muséal. Il fut d’abord envisagé de déposer les fonds naissants dans un local en sous-sol de la nouvelle école de la Croix d’Ouchy. Puis le syndic Louis Gagnaux fut chargé de négocier – en vain – la mise à disposition par l’État d’une salle ad hoc dans le futur Palais de Rumine. Ce n’est qu’en 1900 que se dessina une piste plus encourageante, quand il fut envisagé d’installer le futur Musée du Vieux-Lausanne dans l’ancien donjon de l’Évêché, en cours de classement à ce moment-là. Après restauration de l’Ancien-Évêché, le musée trouvera effectivement sa place dans la partie méridionale du bâtiment en 1918.
La collection qui se constitua dès 1898 se distingue par son caractère éminemment éclectique. Dessins, estampes, huiles, photographies anciennes, éléments d’architecture et objets les plus divers: tous les témoignages touchant au passé lausannois furent recueillis.
À mesure que l’institution prenait forme, le facteur financier se signala comme une contrainte de plus en plus pressante. Il s’avéra bientôt que l’un des moyens d’y faire face consisterait dans la création d’une association, les cotisations de ses membres permettant d’alimenter la caisse. L’Association du Vieux-Lausanne fut officiellement fondée lors d’une assemblée réunie le 6 février 1902, sous la présidence du syndic Berthold van Muyden, juste après que la Commission eut entériné sa propre dissolution. La nouvelle entité se présentait comme une «association auxiliaire» chargée de «recueillir tout ce qui concerne le passé de notre ville au point de vue historique ou archéologique» (extrait de la circulaire de convocation, cité dans Pavillon 1998, 35). À ce stade, la collection comportait déjà 1253 objets, dont «95 poteries, terres cuites et verreries» (p. 36). Ces objets étaient la propriété de la Ville et il en irait de même des futures acquisitions de l’Association; à la Municipalité incombait la charge de fournir des locaux propres à héberger cette collection.
Les deux objectifs prioritaires de l’Association étaient clairement établis: l’organisation d’une grande exposition et, à plus long terme, la création d’un musée, en principe dans les locaux de l’Ancien-Évêché, comme le précisa le président et syndic lors de l’assemblée constitutive.
C’était sans compter la résistance opposée dans les rangs du Conseil communal par les partisans d’une démolition partielle de l’Ancien-Évêché. À l’automne 1908, la Municipalité décida enfin de remanier une partie des prisons installées à l’Ancien-Évêché et l’Association put voter un crédit en vue des premiers travaux de réaménagement.
La première exposition de l’Association se tint en 1902 dans les locaux de la Grenette, sur la place de la Riponne. L’événement suscita un nombre impressionnant de dons; à tel point que le comité envisagera bientôt une seconde exposition, qui sera montée en 1908 dans une salle du Palais de Rumine.
Pour en revenir au futur musée: après l’achèvement des fouilles archéologiques entreprises sur le site de l’Ancien-Évêché fin 1911, le temps était venu d’aborder concrètement la restauration du bâtiment et son adaptation à la fonction muséale. Un projet d’architecte fut présenté fin 1912, qui ne sera traité qu’en 1916. Les travaux seront achevés à l’automne. Chargé dans un premier temps de classer les collections, l’architecte Henri Pellet sera finalement nommé au poste de conservateur le 1er novembre 1918. Il était secondé dans sa tâche par une Commission du musée composée de l’ancien syndic Maillefer, du notaire Henri-Samuel Bergier, de l’imprimeur Georges-Antoine Bridel, du professeur André Kohler et du secrétaire communal Aloïs Haemmerli.
Le Musée du Vieux-Lausanne fut inauguré le 27 décembre 1918. Les collections étaient déployées dans quatorze salles réparties dans la tour Jaquemard, dans l’aile de Prangins et au rez-de-chaussée du bâtiment principal. Dès 1923, le musée s’étendra dans la villa Mon-Repos, dont la Ville venait d’hériter, en y installant une exposition permanente portant sur l’iconographie lausannoise.
Les collections du Musée du Vieux-Lausanne continuaient à se développer lorsqu’en 1948 l’Association modifia ses statuts, qui précisaient désormais que les objets acquis «en tout ou partie avec l’argent provenant de subventions de la Commune sont de plein droit propriété communale» et que «l’Association peut déposer au Musée, d’entente avec le conservateur, des objets et documents qui demeurent sa propriété» (extraits de l’article 8 des statuts, cités dans Pavillon 1998, 63). Comme le remarquait Olivier Pavillon, la distinction n’est pas aisée à établir entre ces deux catégories, étant donné les informations souvent lacunaires fournies par les anciens inventaires.
Dès 1957, des travaux de rénovation et d’extension furent entrepris à l’Ancien-Évêché qui aboutiront en 1964 à l’inauguration d’un musée rafraîchi, agrandi et rebaptisé: le Musée de l’Évêché (l’appellation sera complétée l’année suivante: Musée de l’Ancien-Évêché, puis encore une fois en 1970: Musée historique de l’Ancien-Évêché, Collections du Vieux-Lausanne).
Dès la fin des années 1970, la Ville commencera à développer une véritable politique muséale, notamment dans la perspective de l’émergence de nouvelles institutions (le Musée de l’Ermitage, ouvert en 1984; le Musée de l’Élysée inauguré en 1985). Dans le rapport qu’il délivra au début de 1981, le délégué aux affaires culturelles préconisera entre autres d’affecter la totalité du bâtiment de l’Ancien-Évêché au Musée historique. L’année suivante, la Ville prenait à sa charge le travail de secrétariat de l’Association, et donc du musée. Pour ce dernier, cet acte renforça définitivement son statut d’institution municipale. L’accession de Marie-Claude Jequier au poste de conservateur, en 1983, favorisera une nouvelle dynamique qui conduira à une modernisation de la gestion de l’institution et au lancement de nouveaux travaux de rénovation et d’extension, nettement plus ambitieux que les chantiers précédents. Le Musée historique de Lausanne, Collections du Vieux-Lausanne, ainsi qu’il fut renommé en 1989, inaugura ses locaux profondément remaniés en mai 1990.
Aujourd’hui, les collections du Musée historique de Lausanne sont subdivisées en trois départements: iconographie, photographie et objets (Kulling 2006, 10). Le dernier secteur s’est développé régulièrement. Une véritable politique d’acquisition s’est manifestée principalement dans les registres des étains et de l’argenterie lausannoise, qui constituent le véritable point fort de la collection d’art appliqué. S’agissant de la céramique, l’accroissement des fonds resta beaucoup plus modeste et surtout aléatoire.
Parmi les acquisitions les plus anciennes – et qui ne sont en général pas datées dans les inventaires – on remarque quelques terres cuites engobées des XVIIIe et XIXe siècles, d’origine probablement vaudoise (par exemple, MHL AA.46.D.18; MHL AA.46.D.6; MHL AA.46.B.36); deux porcelaines de Nyon, dont une intéressante tasse avec soucoupe à motif de silhouette (MHL AA.46.C.19); une douzaine de faïences fines de Nyon à décor imprimé des périodes Delafléchère et Bonnard & Gonin; deux groupes en porcelaine allemande, l’un de Frankenthal (MHL AA.46.C.48), l’autre de Nymphenburg (MHL AA.46.C.45); une figurine en porcelaine de Derby (MHL AA.46.C.58); deux terrines en trompe-l’œil de la manufacture strasbourgeoise de Paul Hannong (MHL AA.46.B.29), spécimens remarquables bien qu’en mauvais état de conservation. Un ensemble pour le moins hétéroclite donc, qui se constitua surtout au hasard des donations. Un objet mérite cependant d’être mis en exergue, un témoin précieux – et malheureusement bien isolé – du passé céramique lausannois: le plat signé de Jean Daniel Balien et daté de 1799, légué par Jules Mellet en 1906 (MHL AA.46.D.13). Archéologue autodidacte, Mellet siégea notamment au Comité du Vieux-Lausanne. Sa nécrologie précise qu’il collectionnait entre autres des armes, des pots et des plats d’étain, ainsi que des faïences (Feuille d’avis de Lausanne du 17 octobre 1906, 12).
Les inventaires se firent plus fiables dès la seconde moitié du XXe siècle. Mais les enrichissements dans le secteur céramique resteront anecdotiques, avec ici ou là quelques dons d’objets commémoratifs en lien avec Lausanne et issus de la Poterie moderne de Chavannes-près-Renens. En 1986, Pierre Bernays fit don de six grès rhénans provenant de collections familiales anversoises (MHL AA.VL 86 C 34; MHL AA.VL 86 C 35; MHL AA.VL 86 C 36; MHL AA.VL 86 C 37; MHL AA.VL 86 C 38; MHL AA.VL 86 C 39). Messire Pierre Édouard Victor Bernays, écuyer, né à Anvers en 1898, mourut à Lausanne en 1992 (24 Heures du 14 novembre 1992, 24 – Geneanet.org).
Un autre ensemble, tout aussi isolé dans les fonds du musée, fut offert en 1996 par William-André Berruex: trois porcelaines de Meissen, un intéressant compotier de Nyon des années 1785-90 (MHL VL 96 C 3465) et, surtout, un modèle inédit de vase couvert en porcelaine de Vincennes (MHL VL 96 C 3454) et sept porcelaines de Sèvres de belle qualité (MHL VL 96 C 3450; MHL VL 96 C 3451; MHL VL 96 C 3452; MHL VL 96 C 3453; MHL VL 96 C 3455; MHL VL 96 C 3457), qui toutes proviennent de services dûment identifiés. Berruex (né en 1924) était une figure de l’Église libre vaudoise: après ses études à la Faculté de théologie de ladite église, il intégra la communauté de Taizé dès 1949 où il prit le nom de frère André. De retour au pays en 1970, il exercera le ministère pastoral dans la paroisse de Lucens-Curtilles-Chesalles jusqu’en 1991. Il mourut à Lutry en 2005 (La Nation du 4 février 2005, 2).
En 2002, le musée reçut de l’État de Vaud un ensemble d’objets et d’archives provenant de la succession Maurice Dusserre, décédé en 1996, et qui constituaient pour l’essentiel le fonds d’atelier de son épouse et cousine Edith née Duflon. Le lot comprend plusieurs dizaines de céramiques et nombre de dessins préparatoires pour des formes et décors en faïence et pour des créations textiles. Maurice Dusserre (1899-1996) fut peintre, graveur et metteur en scène. Il créa également des décors pour le Théâtre de Lausanne dans les années 1920-40. En 1930 il épousera Edith (Saint-Pétersbourg, 1898-Lausanne, 1992), céramiste, peintre et décoratrice, notamment dans le domaine textile. Grâce à la succession Dusserre, le Musée historique dispose d’un ensemble représentatif – et probablement unique – du travail pratiquement inconnu à ce jour d’Edith Duflon, l’une des rares femmes de son époque à avoir embrassé le métier exigeant de céramiste (voir aussi sous «Edith Dusserre-Duflon»).
Le Musée industriel et ses successeurs
Le Musée industriel de Lausanne fut la première institution de ce type en Suisse et la seule qui soit né d’une initiative privée (Deléderray-Oguey 2011, 78). Créé et financé par Catherine de Rumine (1818-1867), née princesse Shakowskoy, le Musée industriel fut inauguré le 1er mars 1862, dans un bâtiment construit à cet effet au numéro 8 de la rue Chaucrau. L’immeuble comportait, en plus des deux galeries dévolues à l’exposition, une salle de cours et de conférences. Pendant les premières années de fonctionnement, la fondatrice sera secondée par Charles-Théophile Gaudin (1822-1866), théologien de formation et, depuis 1854, précepteur du fils de Catherine, Gabriel de Rumine (1841-1871). Membre éminent de la Société vaudoise des sciences naturelles – il était féru de géologie et de paléontologie – Gaudin joua un rôle de premier plan dans la genèse et dans l’orientation scientifique du projet. Il deviendra le premier directeur du nouveau musée, secondé dans sa fonction par les deux autres membres du comité de direction, l’ingénieur Charles Dapples et Gabriel de Rumine.
Toutes proportions gardées, le projet lausannois se situait clairement dans la mouvance initiée par le nouveau Musée de South Kensington – le futur Victoria & Albert Museum – fondé en 1852 à l’instigation du prince Albert, au lendemain de l’Exposition universelle de Londres en 1851. L’exposition avait mis en exergue la puissance et les bienfaits de l’industrialisation; avec leur nouvelle institution, les concepteurs du South Kensington Museum voulaient créer un lieu voué à l’éducation des industriels, des créateurs d’objets et du public en général, pour que la production industrielle ne se développe pas selon les seules lois de l’économie, loin de toute référence culturelle et de toute exigence esthétique.
Dans une brochure programmatique publiée en 1861, Gaudin précise les buts du Musée industriel lausannois: «Exposer les matières principales utilisées par l’homme, laisser entrevoir les transformations qu’elles ont à subir aujourd’hui pour lui rendre le meilleur service possible, fournir quelques idées sur l’origine de certaines industries et les phases qu’elles ont parcourues, procurer ainsi aux visiteurs de toutes les classes de la société, principalement à la jeunesse et aux ouvriers, quelques heures d’un loisir instructif, tel est le but de la collection industrielle» (Plan général de la collection industrielle de Lausanne, passage cité dans Kulling 2014, 10). La collection en devenir était subdivisée en sections définies par la nature des matières premières: minérale, végétale ou animale; s’y ajoutait une quatrième catégorie, réservée aux arts graphiques.
Dans le domaine de la céramique, la brochure signale, à la page 7: «Pâtes argileuses plastiques, matière non plastique, vernis opaques et transparents, fondants, couleurs pour décoration des pièces, phases de la fabrication (série promise par M. Gonin à Nyon)». La donation promise par Frédéric Gonin et Adolphe Burnand, copropriétaires de la Manufacture de poteries de Nyon, se concrétisera encore la même année (Kulling 2014, 24, et C. T. Gaudin et G. de Rumine, «La collection industrielle de Lausanne», Gazette de Lausanne du 4 juin 1861, 3). Certains objets issus de ce don ont pu être retrouvés, dont des produits finis que nous pouvons ainsi définitivement attribuer à la manufacture de faïences fines nyonnaise (MHL AA.MI.992; MHL AA.MI.994; MHL AA.MI.995; MHL AA.MI.996; MHL AA.MI.997).
Pour ce qui est de la poterie dite «commune», soit la terre cuite engobée, un matériel didactique similaire sera fourni ultérieurement par Henri von Auw, un potier qui s’était établi à Morges au début de l’année 1863 (Kulling 2014, 24). Ce matériel n’a pas pu être identifié avec certitude à ce jour.
Une année après son inauguration, le musée dressait un bilan encourageant: la salle de la rue Chaucrau avait abrité nombre de cours et de conférences, l’exposition était bien fréquentée et les collections s’étaient enrichies de 900 nouveaux objets, dont «les deux tiers environ [avaient] été offerts par le public; le reste par les fondateurs et la direction» (Kulling 2014, 13). Outre les réalisations les plus novatrices de l’industrie, le Musée s’attachera également à illustrer le développement des différentes techniques au fil du temps. Dans le domaine céramique, cette mise en perspective historique sera rendue possible par l’acquisition d’un certain nombre de pièces anciennes, notamment des faïences italiennes offertes par Madame de Rumine (MHL AA.MI.954; MHL AA.MI.962; MHL AA. MI.960; MHL AA.MI.963), la pièce la plus intéressante étant le vase de pharmacie issu de l’atelier palermitain de Cono Lazzaro (MHL AA.MI.953), daté de 1607 et faisant écho à l’exemplaire signé de la collection Reber (Unil MH-RE-188). Charles-Théophile Gaudin offrit pour sa part trois faïences de Pavie (MHL AA.MI.969) et deux spécimens de faïence lustrée hispano-mauresque (MHL AA.MI. 1002; MHL AA.MI.1003). On signalera au passage que Catherine de Rumine et Gaudin avaient visité ensemble différentes contrées d’Italie dans les années 1856-58, et plus particulièrement la région de Naples et la Sicile en 1863 (Deléderray-Oguey 2011, 10 et 11 – Kulling 2014, 30).
Toujours dans le registre de la céramique italienne, on relèvera des faïences de Montelupo (MHL AA.MI.959; MHL AA.MI.966; MHL AA.MI.958), d’autres exemples de Pavie (MHL AA.MI.968; MHL AA.MI.971; MHL AA.MI.973) – dont un spécimen apparemment unique qui sera remarqué plus tard par les spécialistes italiens (MHL AA.MI.968) – et un plat en terre cuite engobée et gravée (MHL AA.MI.955), un bel exemple de la ceramica graffita de la fin du XVe siècle, fort peu représentée dans les musées suisses. Ces objets furent offerts par William Haldimand (1784-1862), banquier et mécène originaire d’Yverdon, né à Londres, où il fit carrière avant de se retirer à Lausanne pour raisons de santé en 1828. En l’occurrence, il semble bien que les dons de Haldimand ne provenaient pas de sa collection personnelle, mais qu’ils furent acquis par les responsables du musée grâce à ses contributions financières (Kulling 2014, 35 – Deléderray-Oguey 2011, 14).
Relevons encore un ensemble de fleurs en porcelaine tendre de Vincennes offertes par Mme Micheli-Revilliod, des exemples typiques de l’activité de la «fleurisserie» de la future manufacture royale (MHL AA.MI.1092A; MHL AA.MI.1092B; MHL AA.MI.1092C; MHL AA.MI.1092D; MHL AA.MI.1092E; MHL AA.MI.1092F).
À défaut d’exemples originaux, certains aspects de l’histoire de la céramique étaient illustrés par des copies ou des imitations modernes. Les exploits techniques d’un Bernard Palissy (vers 1510-1589/90), par exemple, étaient évoqués dans l’exposition originelle par deux réalisations du célèbre céramiste parisien Georges Pull (1810-1889), offertes par Catherine de Rumine (MHL AA.MI.980).
Parmi les dons attestés pour cette période précoce, signalons quatre porcelaines de Nyon offertes par Mme Brocher-Véret en 1862, dont une tasse agrémentée d’un portrait féminin probablement peint par Étienne Gide (MHL AA.MI.1121) et un présentoir de bouillon orné d’un décor à fond coloré inédit à ce jour (MHL AA.MI.1116).
Charles-Théophile Gaudin mourut le 7 janvier 1866, Catherine de Rumine le 7 mai 1867. Le catalogue du Musée industriel fut interrompu en 1867, il comptait alors 5177 numéros. La fondatrice léguait le musée à la Ville de Lausanne, à condition que «l’ordonnance du musée» restât conforme au plan imaginé par Gaudin et que son fils Gabriel fût nommé à vie «l’un des directeurs de l’établissement afin qu’il puisse toujours s’y intéresser et contribuer par son suffrage à la nomination des employés qui y seront attachés» (Kulling 2014, 40). Catherine léguait également un capital de 10 000 francs, dont les intérêts devaient subvenir aux besoins du musée. Gabriel de Rumine fut effectivement nommé à la direction, mais ne semblait pas s’investir dans sa nouvelle tâche: il s’installa à Paris. Il mourut en 1871, alors qu’il était en route pour Constantinople. Dans son testament, il léguait à la Ville une somme d’un million et demi de francs, destinée à la construction d’un édifice d’utilité publique: ainsi étaient créées les conditions qui permettront la construction du Palais de Rumine (Deléderray-Oguey 2011, 36).
Dès 1871, le Musée industriel se trouva subordonné à la Direction des écoles de la Ville de Lausanne; il devenait ainsi et définitivement un musée public. L’ancien comité de direction avait été remplacé par une commission nommée par la Municipalité et la direction du musée confiée à Samuel Biéler, directeur de l’École cantonale d’agriculture. Après une période de totale léthargie, la direction fut reprise en 1873 par Arnold Morel-Fatio, également conservateur du Médailler cantonal et du Musée cantonal d’archéologie. Sous sa houlette, le catalogue, complètement délaissé depuis 1867, fut repris en main. L’institution retrouva une nouvelle vitalité, mais au prix d’une réorientation profonde par rapport au projet initial de Gaudin: appelé à devenir un auxiliaire de l’enseignement, notamment dans les domaines de la mécanique et de la physique, le musée privilégiait désormais l’aspect purement industriel. L’outil, la machine et le produit fini prenaient le pas sur la matière première, et les industries régionales étaient mises à l’honneur.
En 1905, la Municipalité décida de scinder les collections: d’un côté les fonds «d’intérêt artistique et ethnographique provenant de Madame la comtesse de Rumine» et de l’autre les collections «destinées à l’industrie pratique et à l’enseignement professionnel» (cité dans Kulling 2014, 42). La première catégorie, «relevant des arts décoratifs», sera installée dans l’aile sud du nouveau Palais de Rumine tandis que la seconde, les «objets d’intérêt technique et pratique», restera au Musée industriel de la rue Chaucrau. Sous la direction du nouveau conservateur, Eugène Delessert-de Mollins, et de son adjoint Henri Lador, préparateur au Musée cantonal de géologie, les collections destinées au Palais de Rumine – officiellement inauguré le 3 novembre 1906 – seront regroupées sous le nom de Musée d’art industriel et transférées dans les nouveaux locaux.
Le Musée d’art industriel sera inauguré en septembre 1909. La nouvelle présentation, plus aérée et renouant avec le classement méthodique de Gaudin, était appréciée du public et les dons commencèrent à affluer. Henri Lador, qui joua vraisemblablement un rôle majeur dans la nouvelle installation des collections, accéda au poste de conservateur en 1914, une fonction qu’il assumera jusqu’à sa mort en 1932. Sous le règne de Lador, une trentaine de céramiques au moins furent acquises par l’institution, essentiellement entre 1914 et 1921: un petit ensemble assez hétéroclite glané chez les antiquaires de la ville et qui ne reflète aucune politique d’achat particulière. On relève notamment un groupe de six céramiques japonaises modernes, quelques spécimens chinois, six faïences françaises du XVIIIe siècle, quatre porcelaines de Paris et de Sèvres, une porcelaine de Vienne, une faïence de Delft et deux porcelaines de Nyon. En 1915, le musée s’ouvrit à la création contemporaine en acquérant deux grès de Paul Bonifas (mudac 1000; mudac 1001) dans le cadre de l’Exposition d’art décoratif qui se tint à la Grenette de Lausanne du 3 au 24 décembre 1915, où les céramiques du jeune créateur genevois furent remarquées par les chroniqueurs, de même d’ailleurs que les travaux de l’École suisse de céramique de Chavannes-près-Renens (Tribune de Lausanne du 3 décembre 1915, 2 – Feuille d’avis de Lausanne du 11 décembre, 20).
Du 6 mai au 25 juin 1922, Lausanne accueillit la 1ère Exposition nationale suisse d’art appliqué, à Beaulieu, dans la halle du Comptoir. Organisé conjointement par le Werkbund et par L’Œuvre, l’événement qui réunissait quelque 275 exposants était présidé par Alphonse Laverrière, Paul Perret occupant la fonction de secrétaire-général (Tribune de Lausanne du 13 mai, 4 – du 7 mai, 2-4 ; du 10 mai, 1).
La Commission du Musée d’art industriel fut renouvelée en 1923, avec l’arrivée en son sein de Nora Gross et d’Alphonse Laverrière, tout auréolé du succès de la grande exposition. Nora Gross (1871-1929) dirigeait une école de dessin et d’art appliqué qu’elle avait fondée à Lausanne en 1903 et qui fusionnera avec l’École cantonale de dessin en 1924. Depuis une vingtaine d’années, elle contribuait activement au renouvellement de la production céramique nationale en fournissant formes et décors à différents fabricants, en Suisse romande comme en Suisse alémanique (voir le chapitre «Nora Gross»). Alphonse Laverrière (1872-1954), quant à lui, était un architecte d’envergure internationale et un membre fondateur de L’Œuvre, qu’il présidera de 1913 à 1935. Actif également en qualité d’expert près la Commission fédérale des arts appliqués à partir de 1921, il se profilait comme un personnage influent dans ce domaine. Alors que la tradition voulait que la commission du Musée industriel fût constituée majoritairement de personnalités issues du monde scientifique, cet organe de contrôle prenait désormais une coloration de plus en plus artistique, avec une sensibilité particulière pour l’expression contemporaine.
Pour ce qui touche à la céramique, les premiers achats notables témoignent même d’une ambition internationale, un phénomène qui restera cependant sans lendemain, pour des raisons financières. À l’occasion de l’Exposition internationale des arts décoratifs et industriels modernes de Paris en 1925, les responsables de l’institution firent effectivement plusieurs acquisitions significatives: un vase en grès d’Émile Lenoble (MHL AA.MI.907) et une faïence de Jean Mayodon (MHL AA.MI.905), deux personnalités éminentes de la scène céramique française, ainsi que trois œuvres résolument modernistes créées par l’architecte et designer italien Gio Ponti pour la maison Richard-Ginori (MHL AA.MI.951; MHL AA.MI.949; MHL AA.MI.950). Ces enrichissements remarquables constitueront cependant un cas isolé: aucun autre achat céramique n’est attesté jusqu’en 1935.
Après le décès d’Henri Lador en 1932, la direction du musée sera confiée à Edith Porret, qui avait été l’élève puis la secrétaire de Laverrière. Ce dernier, qui restera très impliqué dans la conduite de l’institution jusqu’en 1950, joua apparemment un rôle majeur dans les décisions stratégiques qui seront prises durant toutes ces années. Face à cette forte personnalité, Porret peinera souvent à imposer ses vues (Zanzi 1989).
L’institution fut complètement remaniée dans les années 1933 et 1934: les objets qui ne témoignaient pas d’une démarche artistique seront répartis entre les musées de géologie, de botanique, de zoologie et d’archéologie. Le Musée d’art industriel ainsi épuré rouvrit ses portes en 1935. La nouvelle orientation de l’institution se reflète clairement dans le développement des collections. Dans le registre de la céramique, elle coïncidera avec l’apparition progressive d’une ébauche de politique d’acquisition, manifestement axée avant tout sur la création artistique contemporaine.
Jusqu’à la fin des années 1950, le musée s’attachera surtout à rendre compte de l’actualité de la création céramique en Suisse, en acquérant notamment des travaux de Paul Bonifas (aujourd’hui dans les fonds du mudac), Marcel Noverraz (MHL AA.MI.1674; MHL AA.MI.1689; MHL AA.MI.1745; MHL AA.MI.1982), Menelika (MHL AA.MI.1691; MHL AA.MI.1673; MHL AA.MI.1692; MHL AA.MI.1675), Thagouhi Beer-Zorian (MHL AA.MI.1659; MHL AA.MI.1744), Charles Beer (MHL AA.MI.1743; MHL AA.MI.1742) ou Bertha Tappolet (MHL AA.MI.1761; MHL AA.MI.1760). Une partie de ces achats se firent dans le cadre des expositions de L’Œuvre; plusieurs pièces d’Hélène et Fritz Haussmann (notamment MHL AA.MI.1762; MHL AA.MI.1763; MHL AA.MI.1835) furent acquises à l’occasion de la 17ème Exposition de la Société suisse des femmes peintres, sculpteurs et décorateurs, présentée au Palais de Rumine du 15 octobre au 12 novembre 1944, dans les locaux du Musée des beaux-arts et du Musée d’art industriel (Feuille d’avis de Lausanne du 16 octobre 1944, 16).
En 1946, le musée sera rebaptisé Musée d’art industriel et d’art décoratif. La même année, Edith Porret s’adressa à l’École suisse de céramique de Chavannes-près-Renens en lui proposant de collaborer à la conception d’un panneau documentaire visant à expliciter les principales techniques illustrées dans la collection: faïence, porcelaine et grès (Zanzi 1989, 42). On ignore ce qu’il advint de ce projet en particulier, mais la démarche constitua certainement l’amorce de contacts plus suivis qui allaient conduire à la mise sur pied, en 1948, de l’Exposition didactique de céramique. Ouverte au grand public mais dédiée avant tout aux élèves des écoles lausannoises, la manifestation se tiendra au musée du 15 novembre 1948 au 15 février 1949. Elle comportait une présentation des différentes variétés techniques – poterie, faïence, grès et porcelaine – élaborée en collaboration avec l’École, ainsi qu’un volet historique alimenté grâce aux prêts consentis par différents antiquaires, collectionneurs, musées, manufactures et artistes (La Nouvelle revue de Lausanne du 23 novembre 1948, 3 – Feuille d’avis de Lausanne du 19 janvier 1949, 44). À cette occasion, l’École fit don de quelques travaux d’élèves (MHL AA.MI.1880; MHL AA.MI.1894; MHL AA.MI.1876; MHL AA.MI.1877; MHL AA.MI.1878), tandis que Roger Corthésy, administrateur de la Poterie moderne à Chavannes-près-Renens offrit deux vases issus de ses ateliers (MHL AA.MI.1892; MHL AA.MI.1893).
Dans les quelques années qui suivirent, le fonds de céramique contemporaine suisse continua de s’enrichir, fût-ce à un rythme modeste, avec notamment l’achat de quelques œuvres de Margrit Linck-Daepp (MHL AA.MI.1868; MHL AA.MI.1869; MHL AA.MI.1954; MHL AA.MI.1910; MHL AA.MI.1921), mais aussi de la génération montante, comme le Lausannois Pierre Wintsch (MHL AA.MI.1955).
Les liens tissés avec l’École suisse de céramique se renforceront encore en 1951, lorsque son directeur, René Burckhardt, fut nommé à la Commission du musée (Zanzi 1989, 35). En 1952 et pour marquer le quarantième anniversaire de l’École, le musée, qui s’appelait désormais Musée d’art décoratif, organisa du 20 septembre au 16 novembre une ambitieuse exposition intitulée «Céramique suisse ancienne et contemporaine» où la partie ancienne semble se réduire à une rétrospective de terres cuites engobées de Heimberg tirées des fonds du musée (Feuille d’avis de Lausanne du 23 septembre 1952, 2 – Tribune de Lausanne du 25 septembre, 5 – La Nouvelle Revue de Lausanne du 23 septembre, 2 – L’Illustré du 23 octobre, 19). C’est bien le volet contemporain, riche de quelque 600 œuvres représentant 70 artistes, les écoles de Chavannes-près-Renens, de Berne et de Genève, ainsi que la section céramique de l’École cantonale de dessin et d’art appliqué de Lausanne qui constituait l’essentiel de la présentation. L’événement comportait une autre rétrospective, dédiée quant à elle au célèbre céramiste Paul Bonifas, avec notamment quatre pièces spécialement envoyées de Seattle, la résidence de l’artiste depuis la fin de la guerre.
Dans le discours qu’il prononça au vernissage de l’exposition, le directeur de l’École se présenta comme l’un des promoteurs du projet, avec deux de ses professeurs, le peintre et graveur Jean-Pierre Kaiser (1915-2001) et le peintre et illustrateur Jean-Jacques Mennet (1889-1969), lequel siégeait par ailleurs à la commission du Musée d’art décoratif. Parmi les exposants, les chroniqueurs signalèrent en particulier Philippe Lambercy, Margrit Linck, Mario Mascarin, Charles Imbert (Menelika), Lucette Hafner, Benno Geiger, Messerli de Bulle, Thagouhi Beer-Zorian, Pierre Wintsch, André Gigon, Pierrette Favarger, René Dony. Le musée fit en outre l’acquisition de quelques œuvres, de Margrit Linck (MHL AA.MI.2581), Hélène et Fritz Haussmann (MHL AA.MI.1972), Benno Geiger (MHL AA.MI.1983), Mario Mascarin (MHL AA.MI.1969), Marcel Noverraz (MHL AA.MI.1982), André Bioley (MHL AA.MI.1981) et André Gigon (MHL AA.MI.1961).
Après la réorientation intervenue au début des années 1920, la partie historique des fonds ne fut pas complètement délaissée, mais les achats se concentrèrent dans un premier temps – entre 1935 et 1944 – sur un petit groupe de terres cuites engobées de Heimberg (MHL AA.MI.1663; MHL AA.MI.1664; MHL AA.MI.1665; MHL AA.MI.1666), celles-là même, probablement, qui figureront à l’exposition de 1952.
Dans les années 1950, en raison de l’insuffisance chronique des moyens budgétaires, Edith Porret se verra contrainte d’axer ses acquisitions prioritairement sur les productions régionales ou nationales (Zanzi 1989, 63). Dans le domaine de la céramique ancienne, qu’elle considérait pourtant comme l’un des plus riches du musée, la conservatrice ne pouvait que constater d’évidentes lacunes. Elle se tourna donc vers le Musée national de Zurich en priant ses collègues de lui dresser une liste des types d’objets les plus indispensables pour présenter un tableau représentatif de l’histoire de la céramique en Suisse aux XVIIe et XVIIIe siècles. Elle consulta également la Société des amis de la céramique suisse pour s’informer d’éventuelles possibilités d’acquisitions à des conditions plus favorables que celles du marché. En 1956, le Musée national l’orienta vers quelques antiquaires qui firent des propositions relativement avantageuses (Zanzi 1989, 64-65).
C’est ainsi qu’entre 1954 et 1959, le musée put acquérir une quarantaine de pièces datant principalement des XVIIIe et XIXe siècles. Dans le domaine suisse, on recense quatre porcelaines de Nyon, le plus beau spécimen étant un sucrier à décor «Marseille» (MHL AA.MI.2142); cinq faïences de Zurich, dont une superbe terrine des années 1765-70 (MHL AA.MI.2586) et une belle écritoire de Bäriswil (MHL AA.MI.2273). Les autres achats concernaient essentiellement la faïence et la faïence fine françaises, dont un intéressant plat de Nevers daté de 1661 (MHL AA.MI.2081); un modèle de vase inédit en faïence fine des Frères Charmot à Jussy (Haute-Savoie), attribué à l’époque à la manufacture Baylon de Carouge (MHL AA.MI.2265); une soupière relativement précoce en faïence de Sceaux (MHL AA.MI.2585); une terrine de Rouen (MHL AA.MI.2136), quelques exemples classiques de Moustiers ou encore des faïences de l’Est de la France, acquises dans certains cas parce qu’elles étaient attribuées à l’époque à des manufactures suisses (MHL AA.MI.2143; MHL AA.MI.2137; MHL AA.MI.2138). Bien que ces enrichissements puissent paraître relativement modestes, la céramique fut le secteur le mieux servi dans ces années-là en termes d’acquisitions (Zanzi 1989, 65).
En 1958, le musée dut quitter le Palais de Rumine, ses locaux étant convoités par la Bibliothèque cantonale et universitaire. Les collections furent mises en caisses et entreposées successivement dans deux dépôts intermédiaires. Elles seront transférées en 1966 dans le nouveau bâtiment de l’avenue de Villamont. Le musée sera rouvert en 1967, avec une nouvelle appellation: Musée des arts décoratifs. Après le départ d’Edith Porret en 1965, c’est désormais Pierre Pauli qui dirigeait l’institution. En raison de leur caractère trop disparate, lacunaire et surtout trop local, les collections resteront en réserve et le nouveau musée se concentrera essentiellement sur une politique d’expositions temporaires composées d’œuvres empruntées à l’extérieur. Les collections seront finalement transférées au Musée historique de l’Ancien-Évêché dans les années 1986 et 1987 – à l’exception des œuvres du XXe siècle. En 2000, le Musée des arts décoratifs fut installé dans les espaces réaménagés de la maison Gaudard, dans le quartier historique de la Cité-Dessous, et prit le nom de mudac, Musée de design et d’arts appliqués contemporains.
Une partie des objets du XXe siècle rejoindront à leur tour le Musée historique en 2013, à quelques exceptions près, comme les travaux de Paul Bonifas, qui resteront dans les fonds du mudac. Ces nouveaux transferts comprenaient notamment une vingtaine de céramiques conçues par Nora Gross et qui n’avaient jamais été inventoriées, ce qui ne permet pas de dater leur entrée dans les collections. Ont-elles été offertes par l’artiste alors qu’elle siégeait à la commission du Musée d’art industriel, ont-elles été données après sa mort en 1929 ou après le décès de son époux Paul Perret en 1947 ? Toujours est-il que ce petit ensemble comporte, outre des modèles créés pour Loder-Walder à Heimberg ou Frank-Jenni à Steffisburg, les seuls exemples connus à ce jour de la collaboration de Gross avec la Manufacture de poteries fines de Nyon, en 1916 (MHL No 11; MHL No 13; MHL No 15; MHL No 16; MHL No 24; MHL No 27).
Sources
La presse vaudoise, consultée sur le site Scriptorium de la Bibliothèque cantonale et universitaire de Lausanne.
Bibliographie
Deléderray-Oguey 2011
Isaline Deléderray-Oguey, Le Musée industriel de Lausanne (1856 à 1909). Mémoire de maîtrise, Unversité de Neuchâtel 2011 (plateforme Péristyle, Société d’histoire de l’art en Suisse).
Kulling 2006
Catherine Kulling, Musée historique de Lausanne. Département des objets. Catalogue. Lausanne 2006.
Kulling 2014
Catherine Kulling, Musée historique de Lausanne. Les collections du Musée industriel. Catalogue. Lausanne 2014.
Pavillon 1998
Olivier Pavillon, Association du Vieux-Lausanne: des pionniers de 1898 à la création du Musée du Vieux-Lausanne en 1918. Mémoire vive. Pages d’histoire lausannoise 7, 9-79.
Zanzi 1989
Annick Zanzi, Histoire du Musée des arts décoratifs de la Ville de Lausanne. Mémoire de licence, Faculté des lettres de l’Université de Lausanne. Lausanne 1989.