Palazzo de Bassus Mengotti
Via da Spultri 270
7742 Poschiavo
Tél. : 081 834 10 20
E-mail : info@museoposchiavino.ch
Céramiques du Musée Poschiavino et de la Casa Tomé dans CERAMICA CH
Le musée Poschiavino, se trouve dans le Palazzo de Bassus-Mengotti à Poschiavo, canton des Grisons. Il rassemble et expose les témoignages de l’histoire, de la culture, de l’art et des conditions sociales du Val Poschiavo. L’objectif est d’éviter que ce patrimoine ne tombe dans l’oubli mais aussi de donner à ce travail de mémoire une place digne de sa valeur pour les générations futures. La vallée a toujours été ouverte aux influences du nord et du sud.
Le Val Poschiavo est l’une des vallées méridionales italophones du canton des Grisons. On peut y accéder depuis la Haute Engadine par le col de la Bernina (à 2 328 m) via Campocologno à l’extrême sud de la vallée, à une quinzaine de km de Poschiavo, à partir de l’actuelle Valteline italienne, qui, jusqu’en 1797 faisait partie des Grisons. Il est également possible d’y accéder depuis la ville italienne de Livigno, mais qui se trouve à une centaine de km de Poschiavo, via la Col de Livigno (à 2315 m). En raison de sa topographie, la vallée a toujours constitué un lien important entre le sud italophone et les Grisons rhéto-romanches ou, au nord, germanophones.
Entre 1100 et 1300 environ, les seigneurs de Mazzo-Venosta ont exercé leurs droits de souveraineté sur la vallée. En 1284, en tant que feudataires (vassaux) des évêques de Coire, ils assument la haute juridiction, tandis que la ville de Côme, en Lombardie italienne, exerce la basse justice et nomme un gouverneur. Dès 1408, les habitants de la vallée se sont placés sous la juridiction de l’évêque de Coire et ont rejoint la Ligue de la Maison-Dieu. La conquête de la Valteline par les Grisons en 1512 a fait du Val Poschiavo un important point de transit pour le commerce et le transport du vin. Après la Réforme, de fortes oppositions entre une population locale, rurale et catholique, et les familles réformées concentrées dans le chef-lieu de Poschiavo, ont façonné le mode de vie du Val Poschiavo jusqu’au 20ème siècle. L’émigration, notamment en tant que confiseurs, reconnus et actifs au niveau international, a aidé de nombreuses familles réformées à atteindre une prospérité appréciable au 19ème siècle. Pour des raisons confessionnelles, cette minorité était plus étroitement associée aux vallées protestantes du nord des Grisons. Ce n’est qu’avec la construction de la route du col de la Bernina (1842-1865) et la construction du chemin de fer de la Bernina (1908-1910) que la vallée s’est ouverte aux flux commerciaux et au tourisme tels qu’ils sont pratiqués de nos jours.
Le musée Poschiavino a été fondé le 2 avril 1950 par la section du Val Poschiavo de l’association Pro Grigioni Italiano (« Pour des grisons italophones »), dans le but de sensibiliser les habitants de la vallée à leur patrimoine culturel diversifié et de recueillir des documents ainsi que des objets relatifs à la vie, au travail et à l’émigration de la population locale. À partir de 1953, la collection, qui ne cesse alors de s’enrichir, est installée dans trois salles du rez-de-chaussée de la Mairie. En 1971, la Société simple du Museo Poschiavino est transformée en Fondation sous la tutelle du canton des Grisons. À partir de 1976, la collection est alors temporairement hébergée dans la maison Olgiati à Plazola
L’actuel site du musée, le Palazzo de Bassus-Mengotti, a été acquis en 1982, puis rénové et transformé. Le palais a été construit en 1655 sur les ordres de Tommaso de Bassus et est ensuite entré en possession de la famille Mengotti. Après avoir subi d’importantes rénovations jusqu’au 19ème siècle, il se présente depuis sa réouverture le 18 mai 1985 comme un bâtiment d’une valeur artistique et architecturale remarquable. Une grande cour au rez-de-chaussée, la chapelle, de sobres couloirs voûtés, des salons bien entretenus avec des boiseries et des plafonds à caissons, des cuisines spacieuses avec des cheminées, et des chambres avec salles de bain qui accueillent les visiteurs dans un environnement reflétant le style de vie des riches familles de Val Poschiavo des siècles derniers. Depuis fin septembre 2013, les précieuses collections ethnologiques de la municipalité de Poschiavo (objets étrusques et indiens) sont également exposées dans ce musée de la vallée.
Le musée dispose d’un autre lieu, la Casa Tomé (MPO-CT). C’est l’une des fermes les plus anciennes et les mieux conservées de la région alpine (Jochum-Siccardi/Nay/Rutishauser 2011). Les origines de la maison remontent au Moyen Âge (construite en 1357/58). La maison est située dans le centre de Poschiavo. La Casa Tomé a été occupée par les sœurs Luisa, Rosina, Ida et Marina Tomé jusqu’en 1992. C’est un rare témoignage de la culture rurale et d’un mode de vie plutôt pauvre et isolé, aujourd’hui dépassé. La maison a été en grande partie conservé dans son état d’origine, car il n’y a pas eu de changements majeurs, ni à l’intérieur ni à l’extérieur, depuis des siècles. La maison est un bâtiment classé depuis 1993. En 2002, elle a été acquise par la Fondation Ente Museo Poschiavino. En 2007, elle a été ouverte au public en tant que deuxième musée, après celui du Palazzo de Bassus-Mengotti. Les deux sites du musée reflètent aujourd’hui les deux visages de la société du Val Poschiavo : d’une part, la réalité rurale qui a façonné la vie dans la vallée jusqu’aux premières décennies du 20ème siècle, et d’autre part, la vie de quelques familles aisées qui ont contribuées à façonner la vie politique, sociale et culturelle du Val Poschiavo.
L’inventaire du Museo Poschiavino a permis de documenter un total de 167 céramiques, qui offrent une image étonnamment variée et inhomogène qui ne peut être mieux assimilée qu’au deuxième coup d’œil et avec des informations sur le contexte culturel et historique. L’inventaire du musée se compose principalement de céramiques pour la table et de récipients de stockage. Des jouets en céramique pour enfants (MPO 10039-01, MPO 10039-02, MPO 13107) et un instrument de musique (MPO 10003) fabriqué par un habitant du Val Poschiavo qui étudiait à Heidelberg, Land allemand du Bade-Wurtemberg, sur le Neckar, sont également représentés.
Il est étonnant, étant donné la position géographique de la vallée, de constater le manque généralisé de céramiques ou de faïences italiennes des 18ème ou 19ème siècle, les diverses provenances internationales de la porcelaine, des faïences fines et des grès des 19ème et 20éme siècles ainsi que la relative « pauvreté » des terres cuites représentées dans les collections du Musée. A l’intérieur du Musée, la céramique est mise en contraste avec de nombreux autres objets pour la table fabriqués dans divers matériaux comme le bois, la tôle ou la pierre ollaire. Ils reflètent ainsi probablement beaucoup plus la réalité de la vie des familles paysannes catholiques pauvres du Val Poschiavo au 19ème siècle et dans la première moitié du 20ème siècle.
Malheureusement, la valeur historico-culturelle d’une petite partie des objets est quelque peu diminuée par le manque d’informations dans l’inventaire sur leurs origines, car, à maintes reprises, des personnes qui ne vivent plus dans la vallée ont fait des dons au musée. A l’heure actuelle, on ne peut donc qu’imaginer l’utilisation locale réelle, par exemple, de la belle série de tasses à café en faïence (MPO 10312 – MPO 10319) de la fin du 19ème siècle provenant de Suisse alémanique (Berneck, canton de Saint-Gall ou région de Heimberg-Steffisbourg, canton de Berne), d’un pot à lait à décor moucheté (MPO 10865) ou d’une cafetière du Sud de l’Allemagne (MPO 10337, voir Heege 2016, 162-169, 222-223).
On peut certifier que la vente des céramiques « à la manière de Heimberg » (de la région de Berneck, canton de Saint-Gall ?) s’étendait au moins jusqu’en Italie, ou presque, car le Musée possède deux petites soupières de ce style (MPO 15196 et 15197), qui proviennent d’un ménage de Brusio à 5km de la frontière italienne.
Les céramiques avec une glaçure au manganèse, comme toujours sans marque de fabrique, sont également représentées par des cafetières, des moules à gâteaux et des bols à café (MPO 10341, 10398 – de Brusio, 10400 – de Brusio). Elles présentent les formes habituelles des céramiques de ce type largement utilisées dans le reste des Grisons, comme on en trouve dans la collection du Musée rhétique de Coire. Cependant, les formes de deux soupières de la collection s’écartent des autres (MPO 10401, 10402). S’agit-il d’importations italiennes ?
En ce qui concerne deux terres cuites à décor tacheté (MPO 10338 et 14408), une assiette en terre cuite simplement décorée (MPO 12370) et une soupière inhabituelle (MPO 10393), le lieu de fabrication ne peut malheureusement pas être déterminé avec précision. Dans le cas de la soupière, en raison de la couleur de sa glaçure, on ne peut pas totalement exclure qu’elle soit originaire de la région du lac Léman ou du canton de Vaud, mais il existe des poteries qui utilisent les mêmes techniques dans le reste de la France. Les trois derniers numéros d’inventaire proviennent d’un ménage de Poschiavo.
Parmi les terres cuites du 20ème siècle, on peut en classer certaines dans deux groupes qui sont, par ailleurs, également très répandus dans le reste des Grisons. Pour celles du premier groupe, elles sont très bien façonnées, vraisemblablement tournées et moulées comme on pourrait s’y attendre pour une production d’une Manufacture de céramique ou d’une importante entreprise artisanale quasi-industrielle. De manière caractéristique, l’entièreté du corps céramiques de ces assiettes, plats et soupières est toujours glaçuré. L’intérieur des soupières et autres récipients peut également être recouvert d’un engobe blanc et présenter différents décors. Ces pièces ne portent aucune marque de fabrique (MPO 10403, MPO 14399 – de Brusio). Jusqu’à présent, nous n’avons trouvé qu’une seule soupière similaire, conservée au Musée rhétique de Coire (RMC H1984.944) qui porte une marque faisant référence à un fabricant potentiel de ce type de produit, la poterie Landert SA à Embrach, canton de Zurich.
Le second groupe est également réalisé à un niveau quasi-industriel, mais semble avoir un engobe de fond d’une couleur variant de rose à beige (MPO 15387 – de Brusio, 18001 – de Poschiavo, voir également les pièces de Casa Tomé). La qualité de la glaçure est également bonne dans ce deuxième groupe. Ces céramiques présentent des décors typiques de la première moitié du 20ème siècle, réalisés au pinceau ou au pochoir. Hormis les numéros qui font référence à leurs dimensions, il n’y a pas de marques de fabrique. Une production d’Allemagne ou de Suisse est cependant vraisemblable.
Dans les foyers de condition modeste du Val Poschiavo, le café, comme toutes les autres boissons y compris le vin, était souvent consommé dans des bols en faïence fine ou en porcelaine, dont le musée conserve toute une série (MPO 10408, 10409, 10410, 15426 et 15433 – de Brusio, 16633), y compris, pour la première fois, des exemplaires d’Italie, mais aussi de Sarreguemines (Faïencerie de Sarreguemines, Utzschneider & Co.) ou de la Manufacture de porcelaine Langenthal dans le canton de Berne. Au vu de la qualité de ces céramiques, on peut conclure qu’il s’agit ici aussi de produits de masse, simples et peu coûteux, qui ont été régulièrement achetés à la pièce et utilisés intensivement.
Il en va de même pour les quelques assiettes en faïence fine et autres objets utilitaires conservés dans le Musée. Pour celles-là aussi, nous n’avons pas de grandes séries, mais plutôt, comme dans la Casa Tomé, toujours des pièces isolées, qui ont peut-être été vendues dans les fermes comme de la vaisselle « d’occasion » pour, plus tard, finalement trouver leur chemin jusque dans les collections du Musée (MPO 10387 – fabriqué à Milan, MPO 10388 – fabriqué à Limoges ? MPO 10389 – vient d’un ménage de Poschiavo, probablement fabriqué en Angleterre, MPO 10390 – fabriqué en Angleterre sur commande pour un grossiste de Bâle, MPO 10391 – fabriqué à Milan, MPO 10392 et MPO 10923 – fabriqué à Sarreguemines en France, MPO 10450 et MPO 10924 – fabriqué à Möhlin dans le canton d’Argovie et MPO 18024 – fabriqué à Wallerfangen dans le Land allemand de la Sarre).
Dicton : « Pour la nourriture et la boisson – Pour le pain quotidien – Je te remercie Ô mon Dieu »
En revanche, le Musée conserve deux assiettes identiques de la Fabrique de céramiques Ziegler à Schaffhouse (MPO 15316) qui proviennent de Brusio. Étaient-elles destinées à la revente ?
Au lieu des nombreuses importations de céramiques d’Italie via la ville de Tirano, à moins de 20km au sud de Poschiavo, que l’on pourrait s’attendre à trouver dans le Musée, il n’y a qu’un seul boccalino en faïence (un petit pichet en forme de bulbe avec poignée pour servir et boire le vin) (MPO 10311). Il provient d’un ménage de Poschiavo. Un pichet avec un goulot tubulaire et une poignée torsadée (MPO 10452), recouvert d’une simple glaçure blanche, est un mystère en soi. Si la forme pourrait correspondre à une production suisse, ça ne coïncide pas avec le type de glaçure. Et, avec cette forme, une origine italienne ne semble pas possible. Au 19ème et au début du 20ème siècle, nous devons probablement prendre en compte qu’il y avait de nombreuses petites poteries régionales, encore inconnues à ce jour (par exemple en Haute-Engadine, près de Tarasp ?), dont l’histoire, l’étendue et le type de production restent à découvrir.
En ce qui concerne le grès, les pots à double anse gris, peints en bleu et émaillés au sel, importés du Westerwald allemand ou d’Alsace, dominaient dans le Val Poschiavo et sont ainsi largement présents dans la collection du Musée (Heege 2009, fig. 2, 52, 54, 56). Ceux-ci étaient généralement utilisés pour conserver du beurre ou du saindoux (MPO 15037 et MPO 15405 – de Brusio, MPO 19000). Ces pots portent tous les indications de leurs contenances, exprimée en litres, estampées sous une des poignées. De cette marque, on en déduit qu’ils ont été importés en Suisse principalement au cours de la période qui suit la Première Guerre mondiale (Heege 2009, 53). On présume que l’importation en masse de ces céramiques très fonctionnelles, cependant lourdes, n’a pu raisonnablement être réalisée qu’en train, c’est-à-dire après 1910 environ.
Parmi les grès, on trouve également une unique bouteille, pressée, destinée à recevoir l’eau minérale aux vertus curatives de la source d’Oberselters dans le Land allemand de la Hesse. Malheureusement, le lieu où ce traitement a été originellement utilisé ne nous est pas connu, mais on peut supposer que l’eau a été consommée dans un ménage socialement supérieur plutôt que dans une ferme où ces bouteilles, très denses et chimiquement stables, auraient probablement été utilisées secondairement pour les eaux-de-vie, l’huile ou d’autres liquides.
DLes céramiques des familles de Poschiavo, socialement plus élevées que celles qui se trouvents en dehors du chef-lieu, nous conduisent aux confiseurs du val Poschiavo, la plupart réformés (84% d’entre eux selon Michael-Caflisch 2014, 243) et actifs dans toute l’Europe (792 confiseurs connus, dont 120 de la famille Semadeni, particulièrement attachée à l’Espagne catholique ; Michael-Caflisch 2014, 244 et 252-253) . Pour eux, d’autres formes de céramiques et d’autres matériaux dominent. On voudrait attribuer à ce groupe social les deux chopes-jouets (pour les poupées) en grès, qui ont été produits par la Fabrique Reinhold Merkelbach du Westerwald, dans le Land allemand du Rhénanie-Palatinat, au début de son activité (MPO 10007, MPO 10367).
Ces neuf pièces qui restent encore d’un service à thé (MPO 12260-01 à 12260-05) provenant du Café Semadeni, qui a existé à Kiev pendant 43 ans, de 1874 jusqu’à la révolution russe (Bühler 2003, 293 ; Kaiser 1988, 120 ; Michael-Caflisch 2014), est emblématique pour les confiseurs de Val Poschaivo. Sa présence dans un musée constitue un témoin de leurs traditions et de leur culture matérielle. Ce service à thé a été produit par la Manufacture russe de porcelaine et de faïence M.S. Kuznetzov à Likino-Duljowo, dans l’oblast de Moscou, entre 1880 et 1890 environ (information amicale sur la société et la marque : Thomas Schröder, Hambourg, Allemagne).
Les confiseurs les plus prospères retournaient souvent dans leurs vallées d’origine et rapportaient des objets de l’étranger. Ils avaient l’habitude d’investir dans des propriétés ou des maisons de leurs lieux d’origine, tout comme leurs parents, restés au pays, investissait une partie de leur capital sous forme de parts dans des sociétés anonymes représentant des confiseries gérées par des confiseurs grisons à l’étranger. Ainsi, d’autres reliquats de services pour la table peuvent probablement aussi être attribués à cet environnement des confiseurs, que ce soit pour leur usage personnel, comme souvenirs lorsqu’ils sont retournés chez eux (MPO 15239 de la famille de confiseurs Olgiati, actifs à Antibes, Amiens et Anvers, en France, ainsi qu’en Angleterre) ou encore pour faire des cadeaux (éventuellement MPO 10101, voir photo de couverture, éventuellement de l’entourage des familles Zala ou Lardelli, actives sur le plan international).
Le Musée possède un grand service (MPO 14909), orné des initiales dorées « MZ », qui compte aujourd’hui encore 325 pièces, dont 40 assiettes identiques, et qui était en possession de Michele Zala, qui a vécu à Poschiavo jusqu’en 1918, grand investisseur dans des confiseries grisonnes de l’étanger. Il a été copropriétaire du Café Universal à Vitoria-Gasteiz (province d’Alava, pays basque espagnol ; Kaiser 1988, 157). Apparemment, avec ce service, on pouvait dresser la table de manière impressionnante pour l’assemblée générale annuelle des actionnaires. Malheureusement, il s’agit d’une porcelaine blanche sans marque (par économie ?), qui a ensuite été dorée. Le fabricant reste inconnu.
Les collections du Musée recèlent également une vaisselle pour poupées en porcelaine (MPO 10039-01, MPO 10039-02) qui a appartenu à la famille de confiseurs Semadeni et on peut présumer, avec peu de chance de se tromper, que cette vaisselle miniature plaquée or (MPO 13107, voir la photo d’introduction) appartient à ce milieu de prospères entrepreneurs ou actionnaires.
On voudrait pouvoir aussi attribuer ces quelques figures en porcelaine (MPO 10639-MPO 10646), entre autres à la production de la Manufacture de porcelaine Ginori à Doccia, près de Colonnata (Carrare), commune de Sesto Fiorentino en Italie ou à la Manufacture de porcelaine Fasold & Stauch à Bock-Wallendorf, dans le Land allemand de la Thuringe, mais malheureusement leur lieu de production reste finalement inconnu.
Un don de la famille de confiseurs Olza, est particulièrement important. Les Olza étaient les patrons du Café Suizo à La Corogne en Espagne (Bordoni 1983, 351) et sont rentrés en Suisse à une époque inconnue avec une grande partie de leurs moules à gâteaux ainsi qu’une collection de faïences espagnoles. Les moules à gâteaux en céramique (MPO 19001-MPO 19003), ainsi que ces trois des pots à lait (ci-dessusMPO 19005-MPO 19007), ont probablement été fabriqués à Soufflenheim en Alsace (F). Il sont, en tout cas, typiques de cette région (Decker/Haegel/Legendre et al. 2003 ; Demay 2003 ; Demay 2004).
La collection de faïences espagnoles (MPO 19010-MPO 19028) est plus conséquente. La plupart d’entre elles proviennent probablement du village de potiers de Manises, près de Valence (Campos/Montagud 2011 ; Vizcaino 1977).
Casa Tomé
Par rapport aux céramiques des confiseurs, la pauvreté de l’inventaire de la Casa Tomé est particulièrement frappante. Mais c’est précisément ce qui lui donne sa valeur, car nous n’avons généralement pas du tout ou très peu de témoins, des sortes d’instantanés qui auraient été préservés d’une vie maintenant irrémédiablement passée. Les sœurs Tomé vivaient avec leur mère dans un endroit très isolé, au sein d’une maison alors déjà très en retard sur son temps en termes de construction et d’infrastructure (pas d’eau courante ni de bain). Il est tout à fait imaginable que, lorsque la famille a repris la maison dans les années 1930, elle ait également trouvé de la vaisselle laissée pour compte, qui est aujourd’hui indissociable de l’inventaire.
À très peu d’exceptions près, les ensembles de céramiques de la casa Tomé contiennent presque toujours des objets isolés, souvent très usés ou qui ont été utilisés intensivement (par exemple MPO CT 0019-MPO CT 0021) ou même réparés (par exemple MPO CT 0031), très probablement acquis sur des marchés aux puces (par exemple cet objet en porcelaine d’un hôtel de Saint-Moritz, à une quarantaine de km de Poschiavo MPO CT 0035).
Parmi les terres cuites, on trouve différents plats et « assiettes à rösti » avec leurs typiques collerettes repliées à angle vif vers l’extérieur, une forme emblématique de la Suisse alémanique, dont un ou deux exemplaires ont peut-être été fabriqués à la fin du 19ème ou au début du 20ème siècle dans la région de Berneck, canton de Saint-Gall (MPO CT 0023, MPO CT 0026). Les deux autres assiettes creuses sont un peu plus récentes (MPO CT 0024, MPO CT 0025).
Parmi les pots à lait, il y a un exemplaire à la paroi verticale recouvert d’une glaçure jaune clair que l’on aimerait volontiers attribuer à la région du lac Léman (MPO CT 0010). Les autres pots à lait, dont trois forment une série à contenances progressives (MPO CT 0013-MPO CT 0015), appartiennent au groupe susmentionné de terres cuites avec une jolie glaçure sur un engobe de fond beige. Ils sont, comme pour les autres, sans marque. Deux autres pièces isolées peuvent être rattachées à ce groupe (MPO CT 0012, MPO CT 0036).
En ce qui concerne la faïence fine, les premiers objets qui ressortent sont deux soupières très utilisées et réparées aux agraphes (MPO CT 0019 et MPO CT 0021), un couvercle, isolé et non assorti à ces soupières (MPO CT 0020) et un bol à café très utilisé et endommagé portant la marque « SCHRAMBERG » (MPO CT 0016). Toutes ces pièces ont probablement été fabriquées au 19ème siècle, cependant, pour certaines, probablement vers la moitié ou même dans la première moitié du 19ème siècle. La soupière de droite sur la photo ci-dessus provient de la Fabrique Baylon à Carouge près de Genève, identifiée grâce à sa marque au tampon de couleur bleue.
Pour la première fois apparaît également une assiette en faïence fine italienne produite par la Società Ceramica Richard, Milan (MPO CT 0032), à laquelle on peut ajouter un exemple plus récent de Laveno, sur le lac Majeur, en Lombardie (MPO CT 0034). Deux autres bols à café non marqués (MPO CT 0017 et MPO CT 0018) sont probablement encore plus récents, c’est-à-dire du premier tiers du 20ème siècle.
Ce groupe comprend également une petite série incomplète de bols avec un décor multicolore pointillé, réalisé à l’aide d’un vaporisateur et de pochoirs. Une petite tasse à espresso, isolée et non marquée, peut se rattacher à ce groupe.
Une deuxième tasse à espresso, unique en son genre, est en porcelaine (MPO CT 0038). Ce groupe comprend une assiette en porcelaine sans décor (MPO CT 0034) et une seconde assiette en porcelaine de Langenthal de 1928, qui porte une marque supplémentaire du fournisseur local et provient du Grand Hôtel La Margna à Saint-Moritz, à une quarantaine de km de Poschiavo.
En ce qui concerne les grès, vous ne trouverez au Musée que les habituels pots à double anse du Westerwald allemand ou d’Alsace (MPO CT 0027 – MPO CT 0031). Ils portent des marques de contenance, parfois exprimée en litres, sous les poignées, ce qui nous conduit à affirmer que certains d’entre eux peuvent dater d’avant le début du siècle ou d’avant la Première Guerre mondiale.
Un de ces pots a été et est toujours cassé (MPO CT 0031). Il a été réassemblé de manière très complexe et fixé avec des bandes et des fils métalliques afin qu’il puisse encore servir.
La foi catholique des habitants de la Casa Tomé est attestée par une statuette en porcelaine de Sainte Thérèse d’Avila importée d’Allemagne (MPO CT 0011) et un bénitier italien en faïence fine fabriqué par la Società Ceramica Italiana de Laveno, sur le lac Majeur, en Lombardie au début du 20ème siècle (MPO CT 0039).
Traduction Pierre-Yves Tribolet
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