Glaçure au manganèse

Andreas Heege, Roland Blaettler, 2019

Glaçure au manganèse dans CERAMICA CH

Cette couleur entre le brun foncé et le brun-noir de la glaçure au manganèse est due aux composés ferro-manganiques présents dans la composition de la glaçure. La glaçure au manganèse peut être appliquée aussi bien sur un engobe de fond blanc, rouge ou brun-noir que directement sur un tesson sans engobe de fond.

Cependant, sur la base de différents critères (trouvailles archéologiques, sources écrites, pièces marquées), on suppose que des céramiques à glaçure au manganèse ont été produites à Kilchberg-Schooren ZH, fabrique dirigée par Johann Jakob Nägeli (1802-1858) puis par Johann Jakob Staub (1858-1907) et Johannes Scheller –  (actif de 1820 à 1869, d’abord à Böndler, puis à partir de 1835 à Schooren; Matter 2012), à Schaffhouse SH  (Fabrique Ziegler), à  Aedermannsdorf SO ou, également, à Winterthour ZH par la fabrique Pfau&Hanhart (1878-1887).  Sur la base de trouvailles archéologiques (Heege 2010, Fig. 56), on peut affirmer qu’une production à Berne a également existé..

De la vaisselle à glaçure au manganèse a probablement été aussi fabriquée dans les manufactures de Suisse romande. La manufacture de faïence fine à Nyon fabriquait ce qu’on appelle de la « vaisselle brune » ou « terre à cuire ». Ce type de produit éminemment utilitaire existait probablement déjà à l’époque de François Bonnard (1845-1859), puis a été perfectionnée par Gonnin. Dans la Gazette de Genève du 11 mai 1847 (p. 4), il y a une étrange publicité qui, dans le cadre d’une société anonyme, offre à louer à Nyon une usine de céramique, « pour fabriquer de la faïence blanche et brune, terre à feu (« terre à cuire ») façon de Paris ». Une lettre à la rédaction (Gazette de Lausanne du 25 mars 1879, p. 2) nous apprend que François Bonnard ne produisait pas seulement de la faïence, mais qu’il avait aussi lancé une production particulière de « terre à cuire brune avec vernis brillant ».

On se pose encore la question de savoir si cette « vaisselle brune » a commencé à être produite sous l’ère Bonnard et Gonin, 1859-1860 ou avant ? En tout cas, elle a été produite durant cette période. Le bloc-note de Frédéric Gonin mentionne diverses expériences concernant entre autres des « terres à cuire » brunes et jaunes. Dans la période suivante de la société anonyme (Manufacture de poteries SA, à partir de 1860), la production de ces céramiques particulières s’est poursuivie (article dans la Gazette de Lausanne du 3 août 1861, p. 2). A l’Exposition nationale de 1883, la Manufacture présente de la « vaisselle blanche » et des « terres à cuire brunes ».

On ne connaît qu’une seule pièce (MHPN 1997-34) pour laquelle sa production à Nyon est certaine car elle porte la marque estampée « NYON ». Cette marque estampée a été introduite pendant la période Delafléchère (1833-1845), puis éventuellement utilisée par Bonnard (sa production est actuellement difficile à identifier) alors qu’elle est certainement – quoique sporadiquement – utilisée pendant la période Bonnard & Gonin. La société anonyme renonce généralement à estamper sa marque de fabrique, mais utilise régulièrement des marques avec des chiffres indiquant la taille de la pièce. Cette marmite brune semble avoir été réalisée pendant la période Bonnard & Gonin (1859-1860) ou pendant la période de la Société anonyme (1860-1870).

Outre les produits des manufactures susmentionnées, il existe des produits à glaçure au manganèse nettement moins standardisés qui suggèrent une production parallèle par des poteries locales (sur ce thème voir Heege 2016, 157-161).

La vaisselle à glaçure au manganèse anglaise (« Jackfield-type ware » du Shropshire et du North-Staffordshire) a des racines plus anciennes (première moitié du 18ème siècle) et fut particulièrement populaire à la fin du 18ème siècle (Stellingwerf 2019, 45). En Allemagne, la glaçure au manganèse est également présente sur les premières productions de Meissen et, à titre d’exemple, dans la production de Bayreuth, Ansbach et Crailsheim au 18ème siècle (Miller/Ziffer 1994 ; Harbermann/Arnold 2006 ; Piereth/Ulrichs 2010).

Traduction Pierre-Yves Tribolet

Termes voisins : vaisselle brune, terre à cuire brune, céramique (engobée) avec revêtement de glaçure plombifère manganèse

Allemand : Manganglasur

Engl.: manganese glaze, earthenware with iron-manganese black lead-glaze (“Jackfield-type ware”)

Bibliographie :

Blättler 2017
Inventaire national de la céramique dans les collections publiques suisses (1500-1950), vol. III/1, Vaud, Sulgen 2017, 296-297

Harbermann/Arnold 2006
Sylvia Harbermann/Waltraud Arnold, Bayreuther Fayencen. Sammlung Burkhardt. Bestandskatalog, 2. erweiterte Auflage, Bayreuth 2006.

Heege 2010
Andreas Heege, Keramik um 1800. Das historisch datierte Küchen- und Tischgeschirr von Bern, Brunngasshalde, Bern 2010.

Heege 2016
Andreas Heege, Die Ausgrabungen auf dem Kirchhügel von Bendern, Gemeinde Gamprin, Fürstentum Liechtenstein. Bd. 2: Geschirrkeramik 12. bis 20. Jahrhundert, Vaduz 2016.

Matter 2012
Annamaria Matter, Die archäologische Untersuchung in der ehemaligen Porzellanmanufaktur Kilchberg-Schooren. Keramikproduktion am linken Zürichseeufer 1763-1906 (Monographien der Kantonsarchäologie Zürich 43), Zürich 2012.

Miller/Ziffer 1994
Albrecht Miller/Alfred Ziffer, Bayreuther Fayencen: Bestandkatalog (Kataloge der Kunstsammlungen, Bayerische Verwaltung der staatlichen Schlösser, Gärten und Seen), München 1994.

Piereth/Ulrichs 2010
Uta Piereth/Friederike Ulrichs, Museum Deutscher Fayencen in Schloss Höchstädt, München 2010.

Stellingwerf 2019
Wytze Stellingwerf, The Patriot behind the pot. A historical and archaeological study of ceramics, glassware and politics in the Dutch household of the Revolutionary Era: 1780-1815, Zwolle 2019.