Winterthour, canton de Zurich, poteries de 1400 à 1900

Aiguière/Verseuse de Winterthour, deuxième partie du 17ème siècle, Musée Ariana, Genève.

Andreas Heege 2019

Céramiques de Winterthour dans CERAMICA CH

Peu de villes en Suisse possèdent autant d’informations sur la production et l’utilisation des céramiques que Winterthour dans le canton de Zurich. Les recherches menées par l’archéologie cantonale ont fourni de nombreux inventaires de fouilles, couvrant une période s’étendant entre les 11ème et 12ème siècles jusqu’au début du 14ème siècle (Matter 2000 ; Matter/Tiziani 2009 ; Homberger/Zubler 2010). Cependant, des fouilles bien datées portant sur la seconde moitié du 14ème siècle sont malheureusement beaucoup plus rares. Il n’existe qu’une seule typologie de fosse à rebuts d’une poterie datant des environs de 1400, située sous la basse tour de Winterthour (Lehmann 1992). L’une des références les plus importantes pour la chronologie de la céramique locale est l’historique des travaux de remblayage d’un puit à la Marktgasse – Ruelle du Marché 25 à Winterthour avant 1501 (Faccani 1994). Un ensemble de fouilles effectuées sur les fosses à déchets de Winterthour couvre une période s’étalant de la fin du 15ème au début du 16ème siècles (Frascoli 2000).  Deux fosses à déchets de poteries datées des années autour de 1600 pour l’une, respectivement du 17ème siècle pour l’autre, sont aussi importantes, car elles établissent des liens avec des pièces de Winterthour conservées dans les musées (Frascoli 2004 ; Tiziani/Wild 1998). Deux inventaires de cloaques de Winterthour, du milieu et de la seconde partie du 17ème siècle, sont particulièrement remarquables (Frascoli 1997). En revanche, nous n’avons pas jusqu’à présent d’informations suffisantes sur les formes locales des céramiques des 18ème et 19ème siècles. Malheureusement, les rebuts de la production de céramiques de la Fabrique de céramiques Hanhart (1879-1887) sont peu nombreux (Frascoli 2004, p. 149, planches 34–38. Sur quelques-uns des rares objets conservés : Blaettler/Ducret/Schnyder 2013, p. 496–499 ; sur la Fabrique, voir également Schnyder/Felber/Keller et autres 1997, p. 38).

Typique pot à poignée torsadée en faïence de Winterthour, daté de 1625 (propriété privée, Suisse).

Du point de vue de l’histoire et de l’histoire de l’art, c’est en particulier la période des poêles en faïence et des objets en faïence de Winterthour de la fin du 16ème au début du 18ème siècles qui retient notre attention. Depuis le 15ème siècle, la présence de potiers à Winterthour peut également être attestées par des archives. Elles mentionnent plus de quatre-vingts potiers, constructeurs de fours et peintres sur carreaux céramiques entre les 16ème et 18ème siècles. Ces artisans appartiennent souvent à plusieurs générations de lignées familiales qui ont brillamment réussi sur les plans économiques et artistiques : les Huser, Mayer, Pfau, Erhart ou Graf. Certaines d’entre elles se sont hissées dans la hiérarchie de l’administration municipale et même jusqu’au bureau de l’Ecoutète (sorte de prévôt qui recevait au nom de son maître – le souverain, le seigneur de la ville, le propriétaire – l’autorité d’obliger les membres d’une communauté à exécuter leurs devoirs, afin, notamment, de percevoir les impôts ou d’assurer le respect d’autres obligations) (Wyss 1973, 50-52 ; Bellwald 1980, 332-353 ; Titiani/Wild 1998, 239-242). Les potiers de Winterthour étaient modestement organisés en guilde et se référaient à un règlement sur la pratique de leur artisanat daté de 1637 et qui resta en vigueur jusqu’en 1798. La réputation des potiers de Winterthour s’étendait bien au-delà des limites de la ville. Les commandes provenaient de villes voisines telles que Lucerne, Zurich, Schaffhouse, Saint-Gall ainsi que des cantons des Grisons, de Glaris, de Thurgovie, de Zoug et de Schwytz pour des poêles destinés à des maisons privées et pour des bâtiments publics d’exception tels que les mairies, les maisons de la guilde ou les monastères.

Le succès économique est venu d’un haut degré de spécialisation et d’une maîtrise supérieure des technologies de la poterie et de la faïence. Cependant, les potiers de Winterthour n’étaient pas les « inventeurs » de cette technologie. L’utilisation de la glaçure stannifère comme peinture sur les carreaux de sol et sur les carreaux de poêle du gothique tardif du milieu et de la seconde moitié du 15ème siècle peut être démontrée en Suisse (Bâle, Berne, Fribourg, Zurich) et dans le sud de l’Allemagne (Constance). Des carreaux de poêles présentant des faïences complètement peintes en blanc ou décorées de couleurs vives se trouvent pour la première fois sur un poêle de 1518 du château de Holligen près de Berne. Puis viennent les poêles de Spiez et de Worb (1543), tous deux également dans le canton de Berne (Roth 1999 ; Heege 2012, 79-83 ; Bourgarel 2013). Ils sont les précurseurs presque parfaits de la production connue des poêles de Winterthour, qui a probablement commencé dans les années 1540 et qui est restée au premier plan jusque vers les années 1700 environ (Bellwald 1980, 16-20 ; Früh 2014, poêle 1). Les potiers de Winterthour n’étaient cependant pas les seuls à dominer la production des poêles en faïence dans la deuxième moitié du 16ème siècle. Des poêles de qualité comparable ont également été réalisés par des potiers de Lucerne ou de Zoug (Brunner 1999 ; Früh 2014, poêle 4). À Zoug, en raison des fouilles, il est prouvé de façon évidente que, comme à Winterthour, il y avait une production de céramiques domestiques en faïence à côté de celle des poêles (Roth Heege/Thierrin-Michael 2016).

La plus ancienne céramique de Winterthour connue est une sorte de pot trompeur daté de 1584, en fait une « Bible à eau-de-vie/chauffe-main » de Ludwig Pfau I (né avant 1550-mort en 1597 ; SNM LM-24116; Frei 1951; Schnyder 1989, cat. 18). Les fouilles archéologiques et les céramiques qui en ont été extraites, aujourd’hui conservées dans les collections des musées, prouvent sans équivoque que la production des potiers de Winterthour n’était pas limitée aux objets en faïence, mais couvrait un champ beaucoup plus vaste. On peut démontrer, en dehors de la faïence (voir la collection du Musée national suisse), trois types de production différents. Le premier est la simple céramique pour les ménages, enjolivée, dès 1550, par la technique naissante du décor au barolet (par exemple SNM HA-3004) ou du décor gravé sous une glaçure au plomb de couleur verte (par exemple SNM LM-DEP-1297).

Bouteille avec bouchon à  vis présentant un décor d’appliques au motif du « Chindlibringer – celui qui apporte les enfants (rôle de la cigogne dans la culture populaire française) » (moule de Lohn, canton de Schaffhouse ?), probablement Winterthour ou Suisse orientale, 17ème siècle (propriété privée, Suisse).

Cruche avec un décor d’appliques, cartouches ou médaillons, dont une représentation de Guillaume Tell tirant sur la pomme déposée sur la tête de son fils, Winterthour ou Suisse orientale, Musée Ariana, Genève.

Un deuxième type englobe des céramiques comportant un décor plus riche sous une glaçure verte ou jaune-brun (par exemple SNM LM-9839 ou peintes en polychromie (par exemple SNM HA-3080). Nous pouvons supposer que les matrices et les modèles étaient probablement produits par les potiers de Winterthour eux-mêmes pour leurs propres productions. On trouve à Winterthour, comme également à Lohn dans le canton de Schaffhouse, des moules exceptionnels (moule/patrice et modèles façonnés avec de l’argile) comme le prouve un moule à biscuit en forme de homard de 1682 (Schaffhouse, Musée de tous les Saints – Museum Allerheiligen Inv. 5848. Widmer/Stäheli 1999, fig. 10).

Ce type de céramique avec un décor de bandes et de taches colorées a également été produit à Winterthour à partir du milieu du 17ème siècle (propriété privée, Suisse).

On trouve également des céramiques avec un engobe de fond blanc et un décor au pinceau, rouge, bleu ou polychrome, sous une glaçure transparente. Ce dernier type démarre à partir des années 1600 et montre des céramiques décorées de traits colorés, ponctuées de taches au brun de manganèse (décor tacheté) et pouvant comporter des éléments en relief (par exemple SNM HA-3101 ; découvertes archéologiques : Titiani/Wild 1998, planches 2-9 ; Frascoli 2004, planches 21-24 ; Lithberg 1932, planches 336 ; Heege 2010, 51-52. Objets de musée : Wyss 1973 ; Schnyder 1989).

Coupe ou jatte à replat (bord coudé), décor au pinceau sous glaçure, Winterthour. Sur le replat, un dicton : « Celui qui croit en Dieu se construit une maison au ciel et sur la terre, 1688 », Musée Ariana, Genève.

Les céramiques au décor peint sous glaçure produites à Winterthour (image ci-dessus) et qui ne représente qu’un segment de la production totale, peuvent être considérées comme des produits moins onéreux, en fait des « copies de faïence ». Leur belle qualité intrinsèque fait qu’elles sont souvent décrites à tort dans la littérature comme de la faïence. Les potiers de Winterthour gardaient l’étain nécessaire à la glaçure stannifère, dont le prix d’achat était élevé, pour les faïences de la production usuelle. Au moins pour le 17ème siècle, le texte sur les céramiques, souvent peu soignés, comme on peut le voir sur la céramique ci-dessus, s’inscrit dans cette logique (MAG 1407 ; par exemple, également SNM LM-4300 ; Schnyder 1989, 79). Ce ne sont probablement pas les artisans les plus doués qui ont peint ces céramiques, mais plutôt des apprentis ou les femmes peintres usuellement employée à la décoration de la vaisselle ordinaire.

Décor au pinceau sous glaçure avec un décor de grands rinceaux en spirales et des fleurs imaginaires, Musée Ariana, Genève.

D’autre part, les décors de vrilles en spirales que l’on voit sur la céramique illustrée en tête de cet article, habilement réalisés, et qui apparaissent également sur les céramiques du Musée Ariana de Genève (MAG R227, MAG R231 ; MAG AR 2015-368), montrent un lien étroit avec les décors peints sur les carreaux de poêles.

Au 17ème siècle, les jattes, les assiettes et les cruches à bec tubulaire dominent la simple vaisselle de tous les jours en terre cuite à glaçure verte, qui n’est guère conservée dans les musées. Les céramiques pour le service de la boisson et pour boire (cruches, pichets et chopes) sont courantes et réalisées de façon élaborée avec des décors au pinceau sous la glaçure ou en faïence peinte. A côté d’elles, on trouve également en masse des écritoires réalisé comme des pièces uniques et des pots à onguents.

La Suisse peut s’enorgueillir de la faïence de Winterthour du 17ème siècle qui figure parmi les meilleures faïences au monde présentes sur le marché de la céramique (collection privée, Suisse).

En revanche, la production de faïence se compose principalement d’assiettes à large bord portant des armoiries, des scènes bibliques ou des allégories, mais aussi de récipients ou objets de forme présentant des ouvertures sur leurs parois accompagnant un décor en relief. Des produits de haute qualité réalisés sur mesure pour leurs clients tels que des écritoires, des fontaines murales, des pots trompeurs et des encadrements font également partie de ce segment de production des potiers de Winterthour.

Étonnamment, après 1710 environ, nous ne connaissons plus aucune céramique datée dans aucun des segments de production de Winterthour mentionnés ci-dessus. Les céramiques de Winterthour méritent des recherches scientifiques approfondies, qui n’ont malheureusement pas encore eu lieu !

Copies d’après les modèles de Winterthour

Il convient ici de mentionner brièvement qu’il existe des céramiques de grande qualité dans le style de l’Historicisme, conçues d’après des modèles de Winterthour (assiettes à large replats et écritoires), fabriqués par la poterie Keiser de Zoug mais malheureusement non signés (Schnyder/Felber/Keller et autres. 1997 ; Messerli Bolliger 1989).

Ecritoire dans le style de l’Historisme, poterie Keiser, Zoug, (collection privée, Suisse).

« Merveilles » des potiers Graf et Pfau de Winterthour

Andreas Heege 2021

Cette contribution a été rédigée dans le cadre des parutions de CERAMICA CH, l’inventaire national des céramiques en Suisse. Voir aussi: Revue 135, Amis suisses de la céramique.

 Introduction

Compte tenu de la longue tradition de collecte et de recherche sur les céramiques de Winterthour (Wyss 1973 ; Schnyder 1989 ; Schnyder 1998), on pourrait supposer qu’il n’y a pratiquement plus de lacunes dans nos connaissances et que tous les objets importants ont fait l’objet de publications. Mais ce n’est pas le cas ! À maintes reprises, des pièces individuelles exceptionnelles qui n’ont jamais été montrées et analysées auparavant, apparaissent dans le commerce international de l’art, Parmi celles-ci, quatre céramiques actuellement dans une collection privée suisse sont présentées ci-dessous. On espère que cette façon de faire stimulera la poursuite des études sur la céramique de Winterthour. Une étude complète sur les objets céramiques de Winterthour, qui figurent parmi plus importantes œuvres produites en Suisse entre 1600 et 1700, n’a malheureusement pas encore été réalisée et constituerait cependant un sujet de thèse digne d’intérêt (voir Wyss 1973, 7).

Ecritoire en forme d’église, datée de 1636

L’objet est en terre cuite et présente, uniquement à l’extérieur, un engobe de fond blanc orné d’un décor polychrome jaune, bleu, brun foncé et rouge réalisé au pinceau sous une glaçure incolore. Les faces intérieures ne comportent ni engobe ni glaçure (fig. 1).

Fig. 1 Ecritoire représentant l’église réformée de la ville de Winterthour ; sur le cadran de l’horloge du clocher de l’église, on trouve la date de 1636 et les initiales « AG ». Probablement réalisé par Hans Heinrich II Graf (1611-1653) pour son frère, le potier d’étain Antoni I Graf (1617-1686). Propriété privée Suisse. Photos pour CERAMICA CH, Andreas Heege.

Sur le dessous de la base, on remarque en outre des traces de glaçure verte. Celles-ci prouvent que l’objet a été cuit dans le même four que de la vaisselle recouverte de glaçure verte ou des carreaux de poêle comportant cette couleur. L’encrier a été assemblé à partir de fines plaques d’argile découpées à partir d’une plaque de base unitaire. Par la suite, les ouvertures des portes et des fenêtres ont fait l’objet de découpes. Les dimensions sont : long. max. 29,2 cm, larg. max. 13,0 cm, haut. max. 34,0 cm.

Cette écritoire a été acquise sur le marché de l’art en France. Elle a été vendue en 2019, dans le cadre de la dissolution du mobilier et des collections d’art du château de Beaurepaire à Martinvast près de Cherbourg, en Normandie. Dès 1867, le château appartenait au baron Arthur Schickler (1828-1919), originaire de Bâle, qui l’a fait reconstruire et agrandir dans le style de l’historicisme. Schickler était un grand collectionneur. En 1890, sa fille Marguerite a épousé le comte Hubert de Pourtalès (1863-1949) d’une famille huguenote française, qui s’était installée dans le canton prussien de Neuchâtel à partir de 1724. Hubert von Pourtalès fut lui aussi l’un des grands collectionneurs de son temps (Sotheby’s, collection Schickler-Pourtalès, Paris 16. Mai 2019). Les pièces les moins précieuses du mobilier du château, dont cette écritoire, ont été vendues aux enchères sur Internet le 18 novembre et les 1er et 2 décembre 2019 par la S.A.S.U. (Société par actions simplifiée à associé unique) Boscher Enchères à Cherbourg-en-Cotentin. Le catalogue numérique de la vente aux enchères (lot n° 194) décrit la pièce comme : « Cathédrale en faïence polychrome. Ep. XIXe, Haut. : 34 cm. Long. : 29 cm. Prof. : 13,5 cm. Restaurations, accidents et manques ».

L’écritoire se présente sous la forme d’une basilique à trois nefs avec deux tours. Dans les églises comparables, celles-ci sont toujours situées à l’est. C’est pourquoi la description qui suit va se référer à cette direction cardinale. Entre les tours, se situe le chœur de la cathédrale, fermé sur trois de ses côtés. Sa façade extérieure est pentagonale et délimitées par des éléments horizontaux et verticaux sur trois niveaux. Des fenêtres carrées et des fenêtres en arcs de cercle alternent sur les deux niveaux supérieurs. A l’ouest, sous un auvent soutenu par deux volutes, se trouve l’entrée de la nef. Au-dessus, une fenêtre bilobée ouvre l’allée supérieure à la lumière. Deux blasons sont peints de chaque côté de la fenêtre. Un porche d’entrée se trouve également sur le côté sud de l’église. Au-dessus de celui-ci, on compte cinq fenêtres. Trois porches étaient à l’origine découpés sur le côté nord, mais un a été refermé avant l’engobage (visible de l’intérieur, fissures dans le glacis à l’extérieur). Il y a également cinq fenêtres au-dessus des deux porches d’entrée restants. A chaque fenêtre du bas correspond, sur les deux côtés longitudinaux de la cathédrale, une fenêtre au niveau supérieur. Toutes les fenêtres sont encadrées de manière imaginative avec des éléments architecturaux dessinés d’une teinte violet manganèse à noirâtre, dont les espaces ainsi délimités sont ensuite remplis en bleu et jaune.

Le toit à pignon, amovible, qui cachait les encriers de l’écritoires, n’a pas été conservé. Le gable à l’ouest de la nef a été brisé il y a longtemps. A l’est, le gable est lui entièrement conservé. Il supporte un putto ailé. Dans le plafond horizontal de la nef centrale, on a pratiqué des ouvertures de tailles différentes pour l’insert de trois ustensiles d’écriture. Ceux-ci n’ont pas été pas conservés. Il manque probablement aussi un grand tiroir, qui aurait pu être poussé dans la nef le long de l’axe longitudinal et aurait formé en même temps le porche d’entrée de l’église. Les toits des allées latérales et du chœur présentent une couverture formée de tuiles plates disposée en queues de castor peintes d’une couleur rouge à rouge-orange dont les contours sont dessinés en brun-noir. Le toit du chœur est également doté de tuiles faîtières et d’arêtiers arrondis. Un clocheton à faîte pointu (qui n’est probablement pas d’origine) forme l’extrémité du toit.

Les deux tours ont été conçues de manière symétrique et possèdent chacune cinq étages percés de fenêtres. Au quatrième niveau, sur les deux tours, sud et nord, est placée une horloge qui indique les heures en chiffres romains avec une seule aiguille. Le centre de l’aiguille porte une étoile alors que ses extrémités sont décorées d’un soleil, respectivement d’un croissant de lune. En dessous de chacune des horloges se trouve la date de 1636, apposée en relief sur les deux côtés, et, au-dessus, les initiales « A G ». Les quatre clochetons d’angle des tours reposent sur une base triangulaire et possèdent chacun un sommet pointu. La flèche effilée de la tour nord a une base carrée, tandis que la flèche de la tour sud est plus polygonale. Toutes les flèches de clochers qui existaient à l’origine ont été coupées. Les bords du socle de l’église et les éléments structuraux des tours et du chœur sont mis en évidence par des rehauts en jaune et en brun-noir.

Objets de comparaison

Fig. 2 Ecritoire représentant l’église réformée de la ville de Winterthour ; sur le cadran de l’horloge du clocher de l’église, on trouve la date de 1637. Probablement fabriqué par Hans Heinrich II Graf (1611-1653) pour Hans Lauffer et Elszbetha Steinerin d’Eglisau. Photos du Musée national suisse de Zurich, Jörg Brandt.

Robert L. Wyss a déjà présenté en 1956 dans la 34ème revue des Amis suisses de la Céramique deux correspondances pour des écritoires de Winterthour en forme de cathédrale. La première écritoire se trouve au Musée national suisse de Zurich (fig. 2, SNM LM-435 ; Wyss 1956, fig. 54 et 55 ; Wyss 1973, 46), et présente les dimensions suivantes : long. max. 27,5 cm, larg. max. 13,3 cm, haut. max. 17,6 cm. Elle est en terre cuite et est recouverte d’un engobe de fond blanc avec un décor polychrome appliqué au pinceau en jaune, bleu, brun foncé et rouge sous une glaçure incolore uniquement présente à l’extérieur. L’intérieur est sans engobe ni glaçure. On n’y remarque que des quelques traces d’engobe et de glaçure qui ont coulé à l’intérieur lors de la pose de la glaçure. L’écritoire est composée de fines plaques d’argile découpées à partir d’une grande feuille d’argile. Les ouvertures des portes et des fenêtres y ont été découpées par la suite. L’écritoire comportait un toit amovible (non conservé).

Les deux pignons de la façade de la nef ont été brisés par le passé. Trois ouvertures pour des ustensiles dédiés à l’écriture ont été découpées dans ce qu’on peut considérer comme le galetas de la cathédrale, lui-même endommagé. Il manque probablement un grand tiroir, qui aurait également formé le portail d’entrée de l’église. Deux porches ont été découpés sur un des côtés de la nef et un de l’autre côté. A l’intérieur des porches se trouvent des traces de personnages qui devaient être présents à l’origine (voir l’écritoire de Vienne, fig. 3). Les deux tours ont été cassées et étaient déjà manquantes lors de leur achat. L’écritoire a été acheté aux enchères en 1893 chez J.J. Gubler à Zurich. Sur les deux clochers se trouve une horloge (endommagée), qui porte la date de 1637 peinte sur le rebord inférieur. Sur la partie inférieure de la tour sud, on trouve aussi un cadran solaire (Kraft 2013, 14, on suppose que le cadran solaire sur la tour sud de l’église de la ville de Winterthour a été installé en 1637).

Robert L. Wyss a pu déterminer les armoiries de mariage à côté du portail d’entrée couvert comme étant celles de « Hans Lauffer » et de « Elszbetha Steinerin ». Hans Lauffer est un bourgeois, de profession « couturier », « enseigne » ou porte-drapeau de son régiment et membre du conseil municipal d’Eglisau, canton de Zurich (Wyss 1956, 23e Il existe également une assiette de Winterthour comportant les armoiries de ce couple d’époux, qui a été vendue à l’origine dans le commerce des antiquités à Munich en Bavière, Peter Vogt, Antiquitäten im Rathaus, München – Antiquités de l’Hôtel de Ville de Munich, Fayence und Steinzeug aus Vier Jahrhunderten – Quatre siècles de faïences et de grès, 2001, cat. 82 – et qui se trouve maintenant dans la collection Neuner dans le sud de l’Allemagne, numéro 2005, 10-11).

Fig. 3 Ecritoire représentant l’église réformée de la ville de Winterthour ; aucune date sur le cadran de l’horloge du clocher de l’église. Probablement réalisé par Hans Heinrich I Graf (1611-1653). Photos du Musée des arts appliqués de Vienne, Thomas Mathyk.

La deuxième pièce comparative est conservée par le Musée des arts appliqués (MAK) de Vienne auquel elle a été donnée en 1946 (fig. 3, Inv. Ke 8032 ; Wyss 1956, fig. 57 et 58 ; Wyss 1973, fig. 61). Elle mesure 26,6 cm de long, 13,7 cm de large et 28,9 cm de haut. Elle est décrite comme de la faïence, mais il s’agit probablement aussi d’une terre cuite avec un décor au pinceau sous glaçure, ce qui n’a malheureusement pas pu être vérifié sur l’original.

Des parties du pignon ouest de la nef, le toit de la nef solidement recollé et les deux extrémités des chapiteaux des tours ont été ajoutés postérieurement. Sur le plan de la forme, la pièce correspond bien aux deux précédentes, mais les dimensions sont différentes et les tours ne font que quatre étages de haut. Sur le côté de l’entrée, il n’y a pas de blasons et les horloges du clocher de l’église n’ont ni date ni initiale. En-dessous des deux horloges des tours, des cadrans solaires sont ici peints en plus sur chaque tour.

Contrairement aux deux autres modèles, les fenêtres n’ont pas été découpées, mais “vitrées” avec des meneaux ou fenêtres à croisées et des soufflages en couronnes. Dans les porches des allées latérales, il y a de petits personnages (femmes ?) et des personnes individuelles (enfants ?) qui se penchent également par les fenêtres des tours ou du chœur. Sur le toit du chœur est posé un gros oiseau. Cette écritoire semble également avoir eu un tiroir qui devait coulisser le long de l’axe central de la nef.

Sur la base de ces deux pièces comparatives, Robert L. Wyss a construit une argumentation détaillée dès 1956 (sur l’état actuel des recherches sur l’église de la ville de Winterthour : Jäggi/Meyer/Windler 1993 ; Kraft 2013) démontrant qu’il est fort probable qu’il s’agisse d’une représentation plus ou moins correcte de l’église réformée de la ville de Winterthour.

Fig. 4 Vue de Winterthour en 1642 par Matthäus Merian, détail avec l’église de la ville. Reproduction pour CERAMICA CH, Andreas Heege.

Il a fondé son hypothèse (Wyss 1956, 23–24) sur deux représentations de cette église, probablement contemporaines aux écritoires. L’une est une représentation de la ville Winterthour par Matthäus Merian datant de 1642 (fig. 4) et l’autre est une représentation de l’église de la ville sur une veduta datant de 1648 conservée au Musée Lindengut de Winterthour (fig. 5 ; Wyss n’a probablement eu cette possibilité qu’en 1956, fig. 59 dans une lithographie plus récente, qui ne correspond pas à l’original dans la conception des chapiteaux pointus. Voir : Bearth/Bellwald/Betschart et autres. 2007, 37).

Fig. 5 Vue de l’église réformée de la ville de Winterthour sur une veduta datant de 1648 conservée au Musée Lindengut de Winterthour. On peut supposer que cette veduta de la ville de Winterthour a fait l’objet de surpeints pour l’adapter aux changements architecturaux ultérieurs à 1648, et ce pas uniquement sur l’église réformée de la ville. Photo de la Société historique de Winterthour.

Les deux vues ne sont donc que légèrement plus récentes que les deux écritoires datées de 1636 et 1637. De nombreux détails de nos écritoires se retrouvent également dans ces vues, tels que le nombre et la position des portes, les fenêtres des nefs latérales et des claires-voies, la verrière au-dessus de l’entrée de la nef, les deux clochers de l’église à l’est et les deux chapiteaux pointus présents dans la vue de 1648.

Fig. 6 Image imprimée de 1725 montrant des éclairs tombant sur le clocher l’église réformée de la ville de Winterthour ; la gravure présente deux différents chapiteaux sur les tours de l’église, dont notamment celui de la tour sud qui date de 1659. Photo du Musée national suisse de Zurich, département des arts graphiques.

 

Le toit de la tour nord est resté avec sa même forme jusqu’en 1794 (fig. 6 ; Gravure du Musée national suisse LM-166626), tandis que celui de la tour sud a déjà été surélevé et équipé d’un nouveau chapiteau en 1659 (Kraft 2013, 8). Sur la gravure de 1642 (voir fig. 4), la tour sud a un toit en forme de pignon, comme on peut déjà le voir sur une gravure sur bois de 1546 dans la « Chronik Gmeiner loblicher Eydgenossenschaft –  chronique de notre digne et louable Confédération » de Johannes Stumpf (il est possible que la vue de la ville de Winterthour figurant sur l’assiette du Musée national suisse HA-3186 ait été créée d’après cette gravure : Wyss 1973, fig. 25). Le toit de la tour sud est donc probablement une invention du fabricant de l’écritoire pour donner une impression plus symétrique.

Ce qui reste inexplicable à propos de ces trois écritoires, c’est la forme du chœur qui ne correspond pas à celui de l’église réformée de Winterthour. Wyss l’avait déjà remarqué (Wyss 1956, 24). L’église de la ville de Winterthour présente encore et toujours ce chœur rectangulaire en retrait, qui n’est pas divisé en trois niveaux. Cette conception du chœur dans les écritoires est-elle donc un vœu pieux ou est-ce qu’une nouvelle structure pour le chœur, dont on aurait ici un modèle, aurait-elle-été prévue vers 1636/1637 ? Il n’y a pas non plus de référence dans les deux vues historiques aux horloges du clocher de l’église qui sont peintes sur les écritoires. Cependant, les horloges correspondent optiquement à celles qui ont été ajoutées en 1659 (voir fig. 6), et qui ont été construites par l’horloger de Winterthour Tobias Liechti (Kraft 2013, 22). Wyss est en mesure de nommer un certain nombre d’autres horloges de conception très similaire réalisées par cette famille d’horlogers, qui, notamment en ce qui concerne les cadrans, correspondent à ceux représentés sur les écritoires avec leurs chiffres romains (Wyss 1956, 24).

Qui est le fabricant ?

Les écritoires présentées par Wyss (voir les figures 3 et 4) ne donnent aucune indication sur l’atelier de poterie de Winterthour qui a produit ces objets en céramique si importants et tellement représentatifs. En comparaison avec un poêle en faïence du Musée national suisse datant de 1636 (Musée national suisse LM-3224, Bellwald 1980, 232 Cat. 9 (Hans Heinrich I. Pfau avec David I Pfau comme peintre), Wyss spécule que Hans Heinrich I Pfau (1559-1636) pourrait avoir été le peintre, travaillant en équipe avec David I Pfau (1607-1670 ; Wyss 1956, 24 fig. 60). Cependant, il n’est pas possible d’établir une corrélation évidente et indubitable entre ces peintres céramistes et les écritoires en question ici.

À ce stade, cette nouvelle écritoire est très probablement utile. En effet, sur la façade ouest de l’église, à gauche de l’entrée principale, sont peintes les armoiries de la famille du potier Graf (ou Graff) de Winterthour. Dix potiers ou maîtres potiers de Winterthour peuvent être rattachés à cette famille (Il manque une généalogie et un historique sur la famille des potiers Graf de Winterthour répondant aux exigences modernes. Elle ne peut donc être fournie ici. Jusqu’à présent, voilà ce qui est disponible : Wyss 1973, 50 ; Bellwald 1980, 338-339, avec des données généalogiques en partie divergentes par rapport au livre des bourgeois de la ville de Winterthour, écrit à la main par Antonius Künzli, 1771-185, pharmacien, président de la ville et généalogiste, p. 365-373 ; sur la base de ce livre ont a établi la fig. 8 avec les numéros d’attribution correspondant au livre des bourgeois. Les informations contenues dans le livre des bourgeois n’ont pas fait l’objet de vérifications supplémentaires).

Fig. 7 Coffre de la guilde des potiers de Winterthour vers 1656, aujourd’hui conservé au musée Lindengut de Winterthour (Inv. HVW 2082). La face avant et le couvercle sont peints avec de nombreuses armoiries de diverses familles de potiers. Photo pour CERAMICA CH, Andreas Heege.

Cette figure héraldique (voir fig. 1), de gueules aux trois ailes d’argent, apparaît également sur le coffre de la guilde des potiers de Winterthour daté d’environ 1656 (fig. 7, voir également la généalogie de la fig. 8) et sur un vitrail de la guilde daté de 1657 (Frei 1929, fig. 6 et 9 ; Bellwald 1980, fig. 17 , ne montre pas le coffre de la guilde des potiers, mais un objet inconnu ! et fig. 19, vitrail d’armoiries. Dernier traitement scientifique : Bearth/Bellwald/Betschart et autres 2007, 26-27, Inv. HVW 2082. Il faut ajouter une cruche en étain peinte, SNM Musée national suisse AG-1791 de 1667, qu’Anton I Graf a créée pour son parent Hans Kaspar Graf et sa femme Anna Hegner et qui est décorée des armoiries des Graf : Schneider 1970, 183, pl. 10). Sur le coffre de la guilde, on trouve les noms de Hans Heinrich Graff sen. (I ? 1583-1634), Hans Heinrich Graff (II ? 1611-1653), Heinrich Graff (peut-être Hans Heinrich 1589-1654 ou Hans Heinrich Graff III, 1635-1696 ?) et Gebhart Graff (II, 1633-1690 ; Données biographiques selon Bellwald 1980, 339 ou selon le livre des bourgeois. Lors de la rénovation du coffre de la guilde en 1733, Abraham Graff a été ajouté avec son blason, 1691-1761, maître 1712). Sur le vitrail de la guilde de 1657, ce sont les mêmes personnes, seul Hans Heinrich Graff sen. manque.

Fig. 8 Généalogie de la famille des potiers Graf, établie sur la base du livre des bourgeois de la ville de Winterthour, écrit à la main par Antonius Künzli (1771-1852, pharmacien, président de la ville et généalogiste). En tout, il existe trois lignées généalogiques de la famille Graf qui ont produites des potiers, indépendantes les unes des autres en raison d’un manque de données. Conception d’Andreas Heege, graphique de Max Stöckli, artmax, Schwarzenburg, canton de Berne.

Le deuxième blason, à droite de l’entrée (voir fig. 1) d’azur à l’estèque (en allemand Drehschiene) de potier d’or, un outil typique et un emblème de la guilde des potiers (en combinaison avec un vase à double poignée pouvant contenir des fleurs, communément utilisé comme emblème de la guilde des potiers d’Elgg, ville médiévale, commune du canton de Zurich, district de Winterthour, comme sur cette enseigne de 1806 conservée au Musée national suisse SNM LM-8644 : Heege 2011, fig. 76,2. L’estèque symbolise également le savoir-faire du potier (Hans Weckerli de Zoug : Roth Heege/Thierrin-Michael 2016, fig. 94). Cet objet, en raison de sa forme visuellement très similaire, est souvent confondu avec la représentation d’un soc de charrue. Dans la littérature, l’estèque est également appelée à tort « bêche de potier » (Frei 1929, 101).  En tant qu’emblème de la guilde, l’estèque se trouve également sur la rosace du plafond de 1562 (Frei 1929, 101-102, illustrations de Bearth/Bellwald/Betschart et autres 2007, 27) de la salle supérieure de la guilde à Winterthour ainsi que, placée à côté d’un pot en terre cuite, sur un vitrail de la « Salle supérieure de la Société (de tir) », daté de 1583 et provenant du « Schützenhaus – Maison du tir » de Winterthour (Frei 1929, 105, fig. 10). En outre, une estèque de potier, combinée avec un croissant de lune et deux étoiles au-dessus de trois coupeaux est le blason de la famille des potiers Reinhart de Winterthour (Wyss 1973, photo de couverture, Musée national suisse HA-3214a). Le potier de Winterthour Andreas Studer l’a également utilisée dans ses armoiries (voir fig. 7, en bas à gauche).

Il est ainsi évident que l‘écritoire de 1636 est un produit d’un des potier Graf ou pour un membre de la famille des potiers Graf de Winterthour. Comme les horloges des tours de deux des exemplaires sont datées de 1636 et 1637, seul Hans Heinrich II Graf (1611-1653) ou son grand-oncle Hans Heinrich Graf (1589-1654) entre en considération en raison des dates de leurs existences (voir généalogie fig. 8, n° 38 et 27). Étant donné que Hans Heinrich II Graf est issu d’une dynastie de potiers s’étendant sur quatre générations et qu’on lui attribue également de nombreux poêles en faïence de très haute qualité (Bellwald 1980, 339), on est enclin à le considérer comme le fabricant potentiel de ces écritoires.

Il reste la question de savoir pour qui cette écritoire a été fabriquée. C’est là que les initiales « AG » au-dessus des horloges des tours entrent en jeu. Il ne peut s’agir des initiales du fabricant, car avec la date de 1636, il n’y aurait pas de potiers Graf avec un prénom correspondant. Dans la généalogie des différentes familles des Graf, il n’y a que très peu de personnes dont le prénom commence par « A » et dont une date ou une période significative de leurs existences correspondraient à la date de 1636 (voir fig. 8). Si l’on ne retient pas le maître de la guilde Abraham Graf (1579-1647, n° 23), qui est le frère du potier Hans Heinrich Graf (1589-1654, n° 27) comme mandataire ou propriétaire de l’écritoire, le candidat le plus sérieux serait l’étainier ou le potier d’étain Antoni I Graf (1617-1686, n° 41 ; Schneider 1970, 183, pl. 10 ; Schneider/Kneuss 1983, 213). Il est ainsi possible que Hans-Heinrich II Graf (1611-1653, n° 38) ait réalisé cette pièce pour son jeune frère Antoni I avant qu’il ne prête serment comme étainier en 1640. Antoni I Graf (1617-1686) fut juge de ville en 1669 et devint même en 1679 magistrat au château de Widen, commune d’Ossingen, dans le canton de Zurich.

Un cadre de calendrier créé par Abraham Pfau en l’année 1662

Fig. 9 Cadre d’un calendrier fabriqué par Abraham Pfau (1637-1691), signé « AP » et daté de 1662. Propriété privée Suisse. Photos pour CERAMICA CH, Andreas Heege.

En mai 2020, une céramique de Winterthour, unique et inhabituelle, a été mise aux enchères (Osenat Maison de ventes aux enchères, sam. 23 Mai 2020 – Les Grands Siècles, Versailles, Hôtel des ventes du Château, 13, avenue de Saint-Cloud 78000 Versailles, lot N° 218) à Versailles, région Île-de-France. Il s’agit d’un cadre de calendrier (fig. 9) : longueur max. 53,7 cm, largeur max. 34,1 cm, épaisseur totale max. 5 cm, épaisseur de la plaque de fond entre 1,6 et 2,1 cm. Le cadre est recouvert d’une glaçure de faïence plombo-stannifère sur sa face frontale et décoré d’une peinture de grand feu, polychrome : bleu, vert, jaune, violet de manganèse et noir. Sur son revers glaçuré en blanc, les contours des initiales « AP » du céramiste et/ou du peintre sur faïence (Abraham Pfau) sont esquissés en bleu au-dessus de la tête d’un putto. La plaque de fond du cadre a été découpée dans la masse d’argile brute ; les marques parallèles de la découpe sont encore présentes.

La découpe de la plaque de fond à la taille du calendrier a été faite à la main et la rainure pour insérer le calendrier a été prédécoupée avec un couteau. Le matériau excédentaire a vraisemblablement été enlevé avec un fil à couper. Par la suite, le cadre de la fenêtre avec son soffite (partie surplombante), ses demi-colonnes et ses chapiteaux ainsi que l’entablement (le couronnement) ont été mis en place puis les putti en relief avec leurs têtes de mort (memento mori) ont ensuite été placé sur l’entablement (s’agit-il de formes retravaillées à partir des moules de Lohn SH ; Widmer/Stäheli 1999, 10). Les lions et les putti de la zone du frontispice ont été exécutés entièrement en ronde bosse ; cela s’applique probablement aussi aux deux coqs. La surface du reste du cadre est modelée en relief. Le putto central du cadre ainsi que les demi-boules ont été placés dans un deuxième temps. Dans la partie inférieure du cadre, deux hémisphères ont été ébréchées après avoir été peintes. Sur les côtés on note la présence de coqs et d’une petite rosette. Le cadre a subi de multiples dommages au cours de sa longue existence : les deux extrémités du frontispice et la partie médiane avec le putto ont été cassés et anciennement recollés ; un putto du frontispice est presque complètement manquant ; on relève d’anciennes traces de colle. Il manque un bras et une aile au deuxième putto ; la queue du coq gauche est cassée. L’angle de la bordure du côté gauche a été heurté, puis rebouché par le passé avec du plâtre puis enfin repeint. À la limite inférieure du cadre, sous une cariatide, il manque un lis orienté vers le bas, en symétrie avec celui de droite.

Sur le plan de la forme, la façade rappelle un portique de style architectural maniériste, très élaboré, ou une ouverture de fenêtre, encadrée d’éléments architecturaux (dimension libre de l’ouverture 19,1 x 14,7 cm). Deux demi-colonnes avec des chapiteaux encadrent l’ouverture. Ils soutiennent l’entablement sur lequel est appliqué une tête de putto ailée et au-dessus une frise animée de deux putti, chacun tenant un sablier. Un putto repose son bras sur un crâne. Il s’agit d’un motif reconnaissable de « memento mori », qui est généralement lié au dicton « Hodie mihi, cras tibi – aujourd’hui la mort vient pour moi, demain elle sera là pour toi » et s’intègre donc bien à un calendrier qui symbolise le passage du temps. Dans de nombreuses variantes depuis le 16ème siècle, voir par exemple :

Au-dessus, il y a un frontispice à volute composé de deux arcs brisés et soutenu par deux lions debout. Entre les deux lions se trouve un autre putto nu, qui soutient sa tête avec sa main comme s’il était plongé dans une profonde réflexion. Sur l’extérieur du frontispice, deux putti ailés s’appuyaient à l’origine sur les volutes. Les demi-colonnes et leurs piètements sont posés sur des piédestaux décorés de têtes de lion, eux-mêmes soutenus par des cariatides. Entre les piédestaux, sous le rebord de la fenêtre, on trouve une console sur laquelle sont appliquées des hémisphères jaunes avec, entre elles, un décor peint de petites tulipes bleues stylisées. Ces hémisphères sont divisés en segments réguliers par des lignes brunes. Les fûts des colonnes sont recouverts de feuilles d’acanthe allongées et enjolivés d’une décoration végétale (Un décor similaire en or ou en bleu existait déjà dans les années 1630 et 1640 : Wyss 1973, fig. 14 ; Schnyder 1989, cat.29-30, 38-39, 41-47, 50-51, 56, 62 ; Schnyder 1998, cat. 28-30, 37) à laquelle pendent des fruits, le tout peint en noir. Sous le rebord de la fenêtre se trouve un cartouche ovale, enroulé, avec la date « MDCLXII » (1662) peinte en noire et, en dessous, une fioriture peinte en forme de S.

Le contour extérieur du cadre est très mouvementé, incurvé, en courbes et contre-courbes baroques et brisées, faisant penser à en oiseau (aigle ?) fendu en deux, dont chaque moitié se trouverait de part et d’autre des colonnes. Les extrémités sont formées par des volutes hélicoïdales posées en saillie. Les hémisphères jaunes ressemblent des clous enfoncés dont on ne verrait que la tête. De chaque côté de la frise, deux coqs colorés sont intégrés dans la courbure des raccords. On trouve des contours très similaires sur un certain nombre de carreaux portant des signatures sur des poêles produits à Winterthour. On titre d’exemple, on connaît deux carreaux de poêles datés respectivement de 1675 et 1689 et signés « AP » (Musée national suisse HA-3254, HA-3090). En outre, on rencontre souvent des formes identiques ou similaires à ces bordures peintes sur les carreaux des poêles de Winterthour jusqu’à la fin du 17ème siècle. Le lien avec Winterthour en tant que lieu de production céramique devient également évident lorsqu’on considère les différentes appliques, les putti, les têtes de lion et les coqs et qu’on les compare aux produits connus de la production de Winterthour, signés ou attribués, en particulier les écritoires de Winterthour tellement caractéristiques (Wyss 1973, fig. 13 – putti ailés, masques de lion), fig. 53 et 54 – écritoires bien comparables ; Schnyder 1989, cat. 93 – putto soutenant sa tête dans une main, représentation encore en usage en 1710 !, cat. 108A -sphères segmentées en jaune et brun ; Schnyder 1998, cat. 47 – putto soutenant sa tête dans une main, cat. 51 – sphères segmentées en jaune et brun.

Le fabricant

La face arrière montre là encore, une ouverture, comme un cadre de fenêtre, entourée par deux traits fins peints en bleu. La découpe de cette ouverture servant de cadre au calendrier a été endommagée par l’insertion ultérieure d’une image sans rapport avec la fonction de l’objet ; image qui a maintenant été retirée. En dessous est peint un putto ailé portant un collier formé d’un ruban terminé par un gland de clé et flanqué, sur les côtés, des lettres « AP ». On peut supposer qu’il s’agit de la signature du fabricant ou du peintre, que l’on peut identifier comme étant celle d’Abraham Pfau (1637-1691), grâce à la date sur la face frontale du cadre. Ce serait probablement aller trop loin que de vouloir voir un autoportrait du peintre dans la tête de ce putto, cependant dessinée de manière très personnalisée (Voir l’autoportrait de l’année 1660 : Bellwald 1980, 338 fig. 112).

Abraham Pfau est issu de la plus importante famille de potiers de Winterthour, les Pfau (voir le coffre de la guilde, fig. 7). Avec son frère David II Pfau (1644-1702) et ses cousins Ludwig III (1628-1683) et Hans Heinrich III (1642-1691), il appartient à la quatrième génération de potiers de cette famille (Voir la généalogie : Schnyder 1990, 13 et Titiani/Wild 1998, fig. 25 avec des informations sur la localisation des ateliers). Cette génération a marqué la fin de cette production exceptionnelle sur le plan de la qualité des poêles et des céramiques utilitaires ou de montre à Winterthour, qui ne dépasse que de peu l’année 1700. Son père, David I Pfau (1607-1670), avec lequel il a également travaillé sur différents poêles en faïence, était surtout réputé comme peintre spécialisé sur faïence. Cela a pu également être prouvé par des trouvailles archéologiques dans le sous-sol d’une propriété situées à Marktgasse 60 (Ruelle du Marché 60) à Winterthour, où une partie de leur poterie a pu faire l’objet de fouilles. En 1652, alors qu’Abraham n’était âgé que de 15 ans seulement, il y construisit, avec son père, un nouveau four à poterie (Tiziani/Wild 1998). En 1663, Abraham Pfau devient maître potier. Au plus tard à partir de 1675, il possédait son propre atelier situé à Untertor 14 (Sous la Tour, 14). Son frère cadet David II séjournait alors dans la maison principale de la Marktgasse 60. Agissant comme une sorte d’entrepreneur général, Abraham, avec son cousin Hans Heinrich III (spécialisé dans la peinture sur faïence) projette de construire un nouveau four à poterie et planifie non seulement les plus importantes commandes des poêles en faïence mais il les réalise également (Tiziani/Wild 1998, 242, 245). En 1690, c’est-à-dire peu avant sa mort, Abraham est également devenu le secrétaire de la corporation des Artisans. Près de 30 poêles en faïence signés de lui ont été conservés jusqu’à nos jours et lui sont évidemment attribués (Bellwald 1980, 338 ; généalogie : Schnyder 1990, 13, resp. Titiani/Wild 1998, fig. 25 avec des informations sur l’emplacement des ateliers).

Fonction et objets de comparaison

Le rebord de la fenêtre, l’entablement et les demi-colonnes sont disposés de telle sorte qu’ils permettent l’existence d’une rainure entre eux et au le dos plat du cadre. Depuis l’arrière, un fin calendrier annuel ou mensuel imprimé, ou encore un « almanach » de peu d’épaisseur (Pour les premiers calendriers et almanachs imprimés (par exemple, le Messager boiteux, paru à partir de 1677 à Bâle), peut être inséré dans le cadre ou l’encadrement.  La rainure entre le devant et la face arrière, plate, a, sur tous les côtés, une profondeur de 1,0 à 1,2 cm et une épaisseur de 0,8 à 0,9 cm. Elle permettrait donc l’insertion d’un objet en papier d’une épaisseur maximale de 0,8 cm, quelque peu flexible (Voir Wyss 1973, fig. 59). Dans le frontispice en arc de voute brisé, il y a un trou pour suspendre le calendrier, ce qui prouve que ces cadres de calendrier ont également pour fonction d’être des objets embellissant le décor de la pièce à vivre.

Les cadres de calendrier en céramique sont cependant très rares par rapport à ceux en bois sculpté (Exemples : Creux 1970, 159 fig. 4 Musée national suisse : AG-10120 – de 1642 ; LM-5260 – de 1689; AG-9008 – 1600-1700). Jusqu’en 1973, Robert L. Wyss ne connaissait que deux autres cadres en céramique comparables avec une glaçure de faïence produits à Winterthour (Wyss 1973, 44. Le Musée national suisse ne conserve à Zurich qu’un autre cadre de calendrier en céramique glaçurée verte avec des appliques en relief, qui appartient probablement à la même période (Musée national suisse IN-101.47, long. 40,0 cm, larg. 22,8 cm, épaisseur max. 5,0 cm, avec insertion latérale du calendrier).

Fig. 10 Cadre de calendrier probablement fabriqué par Hans Heinrich III Pfau (1642-1719), daté de 1667 et portant au verso les initiales « HP » gravées après la cuisson. Ce cadre de calendrier est propriété de la Société historique de Winterthour (HVW 99). Photos pour CERAMICA CH, Andreas Heege.

Un cadre à glaçure de faïence de Winterthour a été réalisé pour Hans Rudolf Pfau et son épouse Ursula Schellenberg en 1667 (fig. 10 ; Musée Lindengut de Winterthour HVW 99, anciennement HAV 951). Au verso, les initiales ligaturées « HP », formant une signature, ont été gravées après la cuisson, ce qui a incité Wyss en 1973 à attribuer cette œuvre à Hans Heinrich III Pfau (1642-1719), le frère de Hans Rudolf Pfau et le cousin de « notre » potier Abraham Pfau. Ce cadre présente les dimensions suivantes :  long. 39,0 cm, larg. max. 24,0 cm et une épaisseur max. de 3,3 cm.

Les dimensions de la découpe pour le calendrier sont de 12,1 cm x 18,8 cm. Il comporte une fente sur le côté pour insérer le calendrier ; une spécificité qui diffère du cadre plus ancien d’Abraham Pfau. La plaque de fond du cadre du calendrier a été découpée à partir d’une masse d’argile. L’épaisseur du feuillet d’argile se monte à 1,25 cm. Le cadre du calendrier proprement dit a été simplement mis en place et reste d’une facture assez sommaire, tandis que le bord de la plaque de fond présente des courbes et contre-courbes prononcés. Le frontispice est décoré des armoiries du couple et de la date de 1667. Deux volutes, dont une est brisée, forment le frontispice, agrémenté d’’une sphère jaune (or). Le trou d’accrochage du calendrier est fortement étiré vers le haut, usé, comme si le cadre avait été très souvent retiré de sa place sur le mur et accroché à nouveau, par exemple pour tourner les pages du calendrier.

Fig. 11 Frontispice de cadre de calendrier avec les armoiries de Hans Rudolf Pfau et de sa femme Ursula Schellenberg, daté de 1667. Photo pour CERAMICA CH, Andreas Heege.

La palette de couleurs de la peinture de grand feu du cadre de ce calendrier est plus restreinte que celle de celui de 1662. Le paon (le nom de famille Pfau signifie paon en allemand) figurant dans les armoiries familiales est très beau et exécuté de façon très détaillée (fig. 11).

Fig. 12 Cadre de calendrier fabriqué par Hans Heinrich III Pfau (1642-1719). Ce cadre de calendrier est conservé par le Musée national suisse de Zurich (SNM LM-29282) ; il a été réalisé pour « Hans Heinrich Escher, à l’époque bailli de Kybourg” (1626-1710) et sa femme « Mme Regula Weerdmüllerin » (1625-1698) ; il est daté de 1673. Photos du Musée national suisse de Zurich, Jörg Brandt.

Le troisième cadre connu (fig. 12) a été réalisé en 1673 et a également été peint par Hans Heinrich III Pfau (1642-1719). Il est signé « HP » (en bas à droite ; Musée national suisse LM-29282, publié pour la première fois dans le rapport annuel du Musée national suisse 68-69, 1959-1960, 18-19 et fig. 39. Provenance : commerce des antiquités, Segal, Bâle). Ses dimensions sont de 53,0 x 39,0 cm x 6 cm (haut. x larg. x profondeur). Contrairement aux cadres de calendrier précédents, dans ce cas, un cadre en bois est chevillé au dos, dans lequel un calendrier ayant des dimensions maximales de 14,3 cm x 20 cm max. peut être inséré. La surface visible du calendrier au recto est d’environ 13,0 cm x 18,2 cm. Les armoiries et l’inscription permettent de connaître son propriétaire ou son dédicataire. Il s’agit de « Hans Heinrich Escher », à l’époque bailli à Kyburg, canton de Zurich (Hans Heinrich Escher vom Glas, 1626-1710) et à sa femme « Fr. (Mme) Regula Weerdmüllerin » (Regula Werdmüller, 1625-1698). Hans Heinrich Escher, fut l’une des personnalités les plus importantes de son époque. Il occupa la fonction de maire de Zurich de 1678 à sa mort. Sa mère, Cleophea Künzli, était la fille du maire de Winterthour, Hans Heinrich Künzli (voir ce mot-clé dans le Dictionnaire historique de la Suisse, version en ligne). Il n’est pas surprenant que l’on trouve dans une telle famille un produit phare de Winterthour produit par la famille des potiers Pfau.

En l’état actuel des recherches, le cadre a probablement été fabriqué par Abraham Pfau dans l’atelier de son père David I Pfau, à la Marktgasse (Ruelle du Marché) 60 à Winterthour, un an avant qu’il ne devienne maître artisan en 1662, et a été peint par lui. C’est jusqu’à présent le plus ancien cadre de Winterthour que nous connaissons et l’une des plus belles pièces de la céramique suisse.

Deux pots trompeurs

Les pots trompeurs, également appelés pots à surprise ou encore pots ou pichets à illusions sont une « invention » de la fin du Moyen Âge (appelés en anglais puzzle jug, en allemand Scherzgefässe, Scherztrinkgefässe, Vexiergefässe ou encore Trinkspiele, et en néerlandais fopkan). Depuis le 15ème siècle, dans la production des grès de Siegburg près de Bonn en Rhénanie-du-Nord-Westphalie (Allemagne) ou dans la région de Raeren/Aix-la-Chapelle, on trouve des cruches aux cols percés dans lesquelles on ne pouvait boire par un orifice de succion placé sur leurs bords que si l’on fermait un trou caché dans la poignée. La poignée était conçue comme un tube creux et comportait une ouverture vers l’intérieur du récipient, juste au-dessus du fond (Klinge 1972, cat. 152-156 ; Roehmer 2014, 63 ; Mennicken 2009, 414-415 cat. 254 ; Mennicken 2013, 122 Figs. 308-315 ; également : Rijksmuseum Amsterdam Inv. BK-NM-9721). Au vu des modèles de Siegburg et de Raeren, il n’est pas surprenant qu’il existe également des pots trompeurs à Cologne/Frechen ou dans le Westerwald allemand qui ont été produits à la fin du 16ème et au début du 17ème siècle selon le même principe fonctionnel (Reineking-von Bock 1986, 249 cat. 312, 280 cat. 377 ; Mennicken 2009, 416-417 cat. 255 ; Roehmer 2014, 220, 224 ; Strauss/Aichele 1992, 72 cat. 64. Et également ces pots trompeurs à la manière du Westerwald t : Museum Rotterdam Inv. 14199, Rijksmuseum Amsterdam Inv. BK-NM-10096 et BK-NM-10094). Après cette époque, ces céramiques particulières ont été connues partout en Europe centrale et des pots trompeurs en porcelaine, faïence, grès, faïence fine ou terre cuite ont été produits sur tout le continent européen et en Angleterre jusqu’à nos jours (il ne semble pas y avoir actuellement de collection plus complète de ce type de pots trompeurs que celle des collections du Österreichischen Museums für Volkskunde – Musée autrichien des arts populaires jusqu’à présent : Peschel-Wacha 2007 ; cf. également : Richter 2012, fig. 19,5 – grès de la collection Ennoch Wood, Dresden Kunstgewerbemuseum – Musée des arts décoratifs de Dresde , Allemagne, Inv. 38816, daté de 1738).

Il n’est donc pas surprenant qu’il y ait quelques rares pots trompeurs répondant à la fonction et au type de céramiques décrits ci-dessus également parmi les céramiques produites en Suisse (voir aussi : Blaettler/Ducret/Schnyder 2013, 52-53 pl. 5 – daté de 1774, avec une forme différente).  La plus ancienne pièce datée, avec l’inscription de l’année 1666, appartient à une variante comportant un décor d’appliques du groupe céramique que l’on nomme faïences à revêtement mince (Victoria&Albert Museum, Londres, Inv. 3060-1853 . Sur ce type d’objets caractéristiques de la Suisse alémanique, voir Frey 2015, 221-248). Il s’agit d’une cruche à ventre sphérique.

Fig. 13 Pot (chope) trompeur de Winterthour, faïence avec peinture de grand feu, décor de vrilles en spirale et de fleurs. Propriété privée Suisse. Photos pour CERAMICA CH, Andreas Heege.

De la production de Winterthour, en revanche, on ne connaît à ce jour que deux formes différentes de pots trompeurs. L’un est en forme de chope légèrement conique (fig. 13) et l’autre est un récipient prenant l’aspect d’un gobelet reposant sur une base en forme de piédouche élevé (voir fig. 18).

Cette chope de Winterthour (fig. 13 et 14 ; diam. 6,8 cm, haut. 13,5 cm, haut. totale avec couvercle en étain 18,0 cm) est recouverte d’une glaçure en faïence décorée d’une peinture de grand feu dans les couleurs jaune, bleu, violet de manganèse, bleu-vert et noir. Son socle est plat et sa partie supérieure comporte des découpes en bandes disposées dans la diagonale. Sous le rebord, on trouve un bourrelet sur lequel reposent à la fois l’anse ou poignée, creuse, et un petit goulot permettant d’aspirer le liquide.

Fig. 14 Pot (chope) trompeur de Winterthour, vue de l’intérieur ; juste au-dessus du fond, on voit la perforation de la paroi communiquant avec l’intérieur de la poignée, creuse. Propriété privée Suisse. Photo pour CERAMICA CH, Andreas Heege.

Cette poignée est reliée à un trou d’aspiration débouchant au fond du récipient (fig. 14). Si vous bouchez avec votre pouce un trou disposé au bas de la poignée, vous pouvez boire le liquide contenu dans la chope en vous servant du petit goulot proéminent sur son bord supérieur. Le décor est composé de vrilles en spirale et de fleurs, largement répandu à Winterthour tout au long du 17ème siècle (Wyss 1973, 20–21, 36–37 ; Schnyder 1989, cat. 111-114 ; Heege/Kistler 2017b, 86–92).

Fig. 15 Pot (chope) trompeur de Winterthour conservé au Fitzwilliam Museum de Cambridge (FWMC Inv. C.2973-1928). Photos du Fitzwilliam Museum de Cambridge.

Un autre pot trompeur de Winterthour – ici, en fait, une chope trompeuse – presque identique, non daté, décoré d’une glaçure de faïence avec une peinture de grand feu, est conservé au Fitzwilliam Museum de Cambridge (fig. 15, haut. 15 cm, diam. de la base 10,5 cm, plus grande largeur avec poignée 15,5 cm ; Fitzwilliam Museum de Cambridge, inv. C.2973-1928). Une troisième chope de ce type, également non datée, a été vendue par un antiquaire de Munich en 1996 (Peter Vogt, Antiquitäten im Rathaus – Antiquités de l’Hôtel de ville, Munich, Fayence und Steinzeug aus Vier Jahrhunderten – Quatre siècles de faïences et de grès, Jubiläumskatalog Zehn Jahre Kunsthandel – catalogue pour la célébration des dix ans du magasin, 1996, objet n° 110). On ignore où elle se trouve actuellement.  Il n’est donc ainsi pas possible d’obtenir une référence plus précise en ce qui concerne la datation de cet objet.

Fig. 16 Pot (chope) trompeur de Winterthour, faïence avec peinture de grand feu, daté de 1668, avec la citation « Ich hab an euch Gedacht an euch ein kram von Winterthur Gebracht – Je me suis souvenu de vous et vous ai apporté quelque chose de Winterthour », conservé au Musée national suisse de Zurich (SNM LM-19780). Photos du Musée national suisse de Zurich, Jörg Brandt.

La situation est différente pour une « chope trompeuse » en faïence du Musée national suisse (fig. 16, haut. 13,5 cm, ou 16,0 cm avec son couvercle en étain ; Publication Wyss 1973, fig. 22 (Musée national suisse LM-19780). Au lieu du décor de vrilles en spirale, elle porte les armoiries d’un couple et est daté de 1668. Les armoiries de l’épouse monogrammées « M.N. » peuvent être attribuées à la famille Nötzli de Zurich, tandis que les armoiries du mari monogrammées « T.ST » ne peuvent être attribuées pour le moment. Heureusement, on trouve également sur le récipient ce dicton connu depuis le premier quart du 17ème siècle : « Ich hab an euch Gedacht an euch ein kram von Winterthur Gebracht – Je me suis souvenu de vous et vous ai apporté quelque chose de Winterthour » (voir Wyss 1973, 20 et fig. 23 ; également Lithberg 1932, pl. 336, A). Une meilleure preuve de son origine est difficilement imaginable.

Fig. 17 Pot (chope) trompeur de Winterthour, faïence avec peinture de grand feu, conservé au Musée national suisse de Zurich (SNM HA-3026). Photos du Musée national suisse de Zurich, Jörg Brandt.

Sa date de 1668 a probablement conduit au fait qu’un autre pot trompeur, lui, non daté, mais également conservé au Musée national suisse, décoré de volutes et de rinceaux d’aspect plus ancien (fig. 17 ; haut. 13,3 cm, ou 16,3 cm avec son couvercle en étain), a également été daté autour de 1660 et attribué à Hans Heinrich II Pfau (1598-1673 ; Musée national suisse HA-3026 ; Schnyder 1989, cat. 91 ; Schnyder 1998, cat. 33). Une analyse stylistique plus détaillée sur une collection plus étendue des céramiques de Winterthour permettrait probablement de déterminer si cela est véridique.

Fig. 18 Pot (gobelet) trompeur de Winterthour, faïence avec peinture de grand feu et appliques en bas-relief. Propriété privée Suisse. Photos pour CERAMICA CH, Andreas Heege.

Le deuxième type de pot trompeur présenté ici reste jusqu’à présent unique (fig. 18, diam. 10,0 cm, haut. max. 13,5 cm ; Provenance : Peter Vogt, Antiquitäten im Rathaus – Antiquités de l’Hôtel de ville, Munich, Fayence und Steinzeug aus Vier Jahrhunderten – Quatre siècles de faïences et de grès, Jubiläumskatalog Zehn Jahre Kunsthandel – catalogue pour la célébration des dix ans du magasin, 1996, objet n° 109). Cette pièce est également recouverte d’une glaçure en faïence avec une peinture de grand feu en jaune, bleu, violet de manganèse et bleu-vert. Cette coupe ou gobelet de forme conique repose sur un haut piédouche, creux, formé de deux parties hémisphériques, accolées et surmontées d’un anneau.

Sur sa face externe, on remarque deux bourrelets horizontaux et quatre verticaux, ainsi que, sur la partie supérieure, quatre tubes verticaux (goulots d’aspiration) en applique. Les quatre champs rectangulaires formés par les bourrelets sont décorés de statues en bas-relief reposant en alternance sur des piédestaux triangulaires. Au-dessus, le bord de la coupe présente des découpes, comme il est d’usage pour les pots trompeurs. Deux trous ronds sont percés sur le côté d’un des tubes verticaux et on pourrait penser, à l’instar des autres pots trompeurs, qu’il faut les garder fermés pour pouvoir boire. Mais ce n’est pas le cas. L’examen visuel de l’intérieur du récipient révèle que l’astuce consiste simplement à savoir lequel des quatre tubes a un lien avec l’intérieur de la coupe. Une fois trouvé, on peut l’utiliser pour y aspirer le liquide et il n’est pas nécessaire de boucher les trous.

Sur la base des motifs et de la manière avec laquelle ils sont peints et en raison du décor comportant ces appliques en relief, il ne fait aucun doute que nous avons affaire à une céramique de Winterthour dans ce cas également. Cependant, la datation reste assez floue en raison de l’absence d’objet de comparaison (Objet semblable : Wyss 1973, nuancier VIII, Musée national suisse, inv. HA-3033) exactement datés reprenant cette forme et ce décor. On peut supposer qu’il a été fabriqué au milieu ou dans la seconde moitié du 17ème siècle.

Résumé

Par leur beauté, leur qualité et leur originalité, les écritoires, les encadrements de calendrier et les pots trompeurs démontrent de manière impressionnante de quoi étaient capable les céramistes Graf et Pfau de Winterthour au 17ème siècle. On ne trouve pas en Suisse des objets céramiques de cette époque qui les dépassent en qualité et en beauté. Ce ne sont pas seulement les magnifiques poêles en faïence qui sortaient de leurs ateliers qui ont fait la renommée des céramistes de Winterthour, mais également ces pièces uniques et ces céramiques modelées à la demande, qui ont été produites pour leurs propres familles ainsi que pour des personnages de haut rang résidant dans la région de Winterthour et de Zurich. Si les écritoires et les encadrements de calendrier peuvent être attribués à certains céramistes ou à des ateliers connus de Winterthour, ce n’est pas le cas des pots trompeurs, un peu plus courants. Cependant, il ne fait aucun doute qu’ils ont aussi été fabriqués à Winterthour.

Une évaluation correcte de la production de Winterthour par rapport au reste du paysage céramique suisse nécessiterait en fait une documentation plus complète portant sur toutes les céramiques connues de Winterthour, présentes dans les musées et les collections privées de Suisse et d’Europe. Malheureusement, une telle étude fait encore défaut aujourd’hui. En outre, les plus importantes collections publiques de céramiques de Winterthour ne sont actuellement plus exposées au public. Peut-être que le présent essai constituera un stimulant incitant les chercheurs et les conservateurs à traiter à nouveau ce sujet de manière plus intensive et à extirper les « trésors » oubliés des céramiques de Winterthour à leur « long sommeil » au sein des réserves inaccessibles des musées. Si des écritoires, des encadrements de calendriers ou des pots trompeurs similaires à ceux présentés ici somnolent toujours quelque part et ne font pas encore l’objet d’une publication, l’auteur serait très reconnaissant qu’ils soient portés à sa connaissance.

Traduction Pierre-Yves Tribolet

Céramiques de Winterthour au Musée national suisse de Zurich

Céramiques de Winterthour au Victoria&Albert Museum de Londres

Céramiques de Winterthour au Musée Fitzwilliam de Cambridge (momentanément non disponible)

Céramiques de Winterthour au Metropolitan Museum, New York

Céramiques de Winterthour au Musée Ariana, Genève

 Bibliographie : 

Angst, Heinrich (1987): Einige Bemerkungen über die Winterthurer Hafnerei. In: Jahresbericht des Schweizerischen Landesmuseums 6, 95–101.
Bearth, Marcel/Bellwald, Waltraut/Betschart, Andres u.a. (2007): Vom Bronzebeil zur WC-Schüssel. 50 Jahre Museum Lindengut Winterthur. Neujahrsblatt der Stadtbibliothek Winterthur 338, Winterthur.
Bellwald, Ueli (1980): Winterthurer Kachelöfen. Von den Anfängen des Handwerks bis zum Niedergang im 18. Jahrhundert. Bern.
Blaettler, Roland/Ducret, Peter/Schnyder, Rudolf (2013): CERAMICA CH I: Neuchâtel (Inventaire national de la céramique dans les collections publiques suisses, 1500–1950). Sulgen.
Bourgarel, Gilles (2013): Les premiers témoignages de productions stannifères en Suisse et dans le canton de Fribourg (XVe-XVIIe siècles), in: Marino Maggetti/Denis Morin/Georges Rech, Deuxième table ronde franco-suisse. Faïences et Faïenceries de l’arc jurassien et ses marges, procédés techniques et décors. L’Apport des sources et de l’archéologie, Fribourg 2013, 59-90.
Brunner, Thomas (1999): Die Renaissance in der Stube, Innerschweizer Hafner und Ofenkeramik im ausgehenden 16. Jahrhundert, in: Kunst und Architektur in der Schweiz 50, 1999, 33-41.
Creux, René (1970): Volkskunst in der Schweiz, Paudex.
Faccani, Guido (1994): Ein Fundkomplex mit Terminus ante quem von 1501 vom Waaghaus (Marktgasse 25). In: Berichte der Zürcher Denkmalpflege 12/1, 1994, 228–250.
Frascoli, Lotti (1997): Handwerker- und Kaufmannshaushalte im frühneuzeitlichen Winterthur. Untersuchungen zu vier Liegenschaften in der Altstadt (Monographien der Kantonsarchäologie Zürich 29), Zürich/Egg 1997.
Frascoli, Lotti (2000): Töpferei-, Glaserei- und Schmiedeabfall der Jahrzehnte um 1500 aus dem Stadtgraben von Winterthur, in: Berichte der Kantonsarchäologie Zürich 15, 2000, 247-284.
Frascoli, Lotti (2004): Keramikentwicklung im Gebiet der Stadt Winterthur vom 14. -20. Jahrhundert: Ein erster Überblick, in: Berichte der Kantonsarchäologie Zürich 18, 2004, 127-218.
Frei, Karl (1928): Zur Geschichte der Winterthurer Ofenmalerei. In: Gewerbemuseum Winterthur (Hrsg.), Führer durch die Eröffnungsausstellung am Kirchplatz, September/Oktober 1928. Winterthur, 57–78.
Frei, Karl (1929): Handwerksaltertümer der Winterthurer Hafner. In: Jahresbericht des Schweizerischen Landesmuseums 38, 84–111.
Frei, Karl (1937): Ein Porträt des Winterthurer Hafners Hans Heinrich Pfau. In: Jahresbericht des Schweizerischen Landesmuseums, 46, 96–112.
Frei, Karl (1951): Ein Scherztrinkgefäss des Winterthurer Hafners Ludwig I Pfau und andere Arbeiten seiner Werkstatt. In: Jahresbericht des Schweizerischen Landesmuseums 60, 1951, 65–73.
Frey, Jonathan (2015): Court, Pâturage de l’Envers. Une verrerie forestière jurassienne du début du 18e siècle. Band 3: Die Kühl- und Haushaltskeramik, Bern.
Früh, Margrit (1981): Winterthurer Kachelöfen für Rathäuser. In: Keramik-Freunde der Schweiz, Mitteilungsblatt Nr. 95, 1981, 3–147.
Früh, Margrit (2014): Biblische Bilder an schweizerischen Kachelöfen. Eine keramische Bilderbibel. In: Keramik-Freunde der Schweiz, Mitteilungsblatt Nr. 128, 2014, 1–159.
Hafner, Albert (1876): Das Hafnerhandwerk und die alten Oefen in Winterthur. In: Neujahrs-Blatt von der Stadtbibliothek Winterthur 213.
Hafner, Albert (1877): Die alten Öfen in Winterthur und Umgebung. In: Neujahrs-Blatt von der Stadtbibliothek Winterthur 214.
Heege, Andreas (2010):  Hohenklingen ob Stein am Rhein, Bd. 2: Burg, Hochwacht, Kuranstalt. Forschungen zur materiellen Kultur vom 12. bis zum 20. Jahrhundert (Schaffhauser Archäologie 9), Schaffhausen 2010.
Heege, Andreas (2011): Langenthal, St. Urbanstrasse 40–44. Die Hafnerei Staub und ihre Werkstatt. In: Archäologie Bern/Archéologie bernoise. Jahrbuch des Archäologischen Dienstes des Kantons Bern, 2011, 209–287.
Heege, Andreas (2012): Dekortechniken auf Ofenkeramik, in: Eva Roth Heege, Ofenkeramik und Kachelofen. Typologie, Terminologie und Rekonstruktion im deutschsprachigen Raum (CH, D, A, FL) mit einem Glossar in siebzehn Sprachen (Schweizer Beiträge zur Kulturgeschichte und Archäologie des Mittelalters 39), Basel 2012, 68-99.
Heege, Andreas/Kistler, Andreas (2017a): Keramik aus Langnau. Zur Geschichte der bedeutendsten Landhafnerei im Kanton Bern. Schriften des Bernischen Historischen Museums 13. Bern.
Heege, Andreas/Kistler, Andreas (2017b): Poteries décorées de Suisse alémanique, 17e-19e siècles – Collections du Musée Ariana, Genève – Keramik der Deutschschweiz, 17.-19. Jahrhundert – Die Sammlung des Musée Ariana, Genf, Mailand.
Homberger, Valentin/Zubler, Kurt (2010): Mittelalterliche und neuzeitliche Keramik der Region Schaffhausen. Typologie, Seriation und Materialvorlage. Beiträge zur Schaffhauser Archäologie 3. Schaffhausen.
Jäggi, Carola/Meyer, Hans-Rudolf/Windler, Renata (1993): Die Stadtkirche St. Laurentius in Winterthur. Zürcher Denkmalpflege, Archäologische Monographien 14. Egg/Zürich.
Klinge, Ekkart (1972): Siegburger Steinzeug. Kataloge des Hetjensmuseums Düsseldorf. Düsseldorf.
Kraft, Sibyl (2013): Die Stadtkirche Winterthur. Schweizerische Kunstführer Serie 93, Nr. 924. Bern.
Lehmann, Peter (1992): Zwei Töpferöfen in der Winterthurer Altstadt. Berichte der Zürcher Denkmalpflege. Archäologische Monographien 12. Egg.
Lithberg, Nils (1932): Schloss Hallwil Bd. 3. Die Funde, Stockholm.
Matter, Annamaria (2000): Keramikentwicklung in Winterthur vom 12. Jh. bis um 1400. Sechs Kellerverfüllungen aus der Altstadt. In: Archäologie im Kanton Zürich 1997–1998. Berichte der Kantonsarchäologie Zürich 15, 183–245.
Matter, Annamaria/Tiziani Andrea (2009): Siedlungsentwicklung an der Marktgasse in Winterthur vom Hochmittelalter bis zur Neuzeit. Zürcher Archäologie 27. Zürich/Egg.
Mennicken, Ralph (2009): Schätze aus Raerener Erde. Katalog des Raerener Steinzeugs aus dem Hetjens-Museum Deutsches Keramikmuseum Düsseldorf. Raeren.
Mennicken, Ralph (2013): Raerener Steinzeug – Europäisches Kulturerbe. Raeren.
Messerli Bolliger, Barbara E. (1989): Arbeiten der Hafnerei Keiser für den Gründungsbau des Schweizerischen Landesmuseums in Zürich, in: Zuger Neujahrsblatt, 1989, 65-84.
Peschel-Wacha, Claudia (2007): «Sauf wonnst konnst». Das Rätsel um die Vexierkrüge. In: Harzenetter, Markus/Isenberg, Gabriele (Hrsg.), Keramik auf Sonderwegen. 37. Internationales Hafnerei-Symposium, Herne 19. bis 25. September 2004. Denkmalpflege und Forschung in Westfalen 44. Mainz, 41–52.
Reineking-von Bock, Gisela (1986): Steinzeug. Kataloge des Kunstgewerbemuseums Köln 4. Köln.
Roehmer, Marion (2014): Formenkosmos Siegburger Steinzeug. Die Sammlung im Hetjens-Museum. Düsseldorf.
Roth, Eva (1999): Ein bernischer Fayence-Kachelofen aus dem Jahr 1518, in: Kunst und Architektur 50, 1999, 22-32.
Roth Heege, Eva/Thierrin-Michael, Gisela (2016): Oberaltstadt 3/4, eine Töpferei des 16. Jahrhunderts und die Geschichte der Häuser, in: Eva Roth Heege, Archäologie der Stadt Zug, Band 2. Kunstgeschichte und Archäologie im Kanton Zug 8.2. Zug, 10–154.
Schneider, Hugo/Kneuss, Paul (1983): Zinn. Die Zinngiesser der Schweiz und ihre Marken. Olten/Freiburg i. Br.
Schnyder, Rudolf (1989): Winterthurer Keramik. Winterthur.
Schnyder, Rudolf / Felber, Friederike / Keller, Rolf u.a. (1997): Die Entdeckung der Stile. Die Hafnerei Keiser in Zug 1856-1938. Ausstellung vom 10. November 1996 bis 1. Juni 1997, Museum in der Burg Zug, in: Keramik-Freunde der Schweiz Mitteilungsblatt 109/110, 1997, 7-57.
Strauss, Konrad/Aichele, Frieder (1992): Steinzeug. Battenberg Antiquitäten-Kataloge. Augsburg.
Tiziani, Andrea / Wild, Werner (1998): Die frühneuzeitliche Hafnerei der Familie Pfau an der Marktgasse 60 in Winterthur. In: Archäologie im Kanton Zürich 1995–1996. Berichte der Kantonsarchäologie Zürich 14, 1998, 225–264.
Widmer, Hans Peter / Stäheli, Cornelia (1999), Schaffhauser Tonmodel. Kleinkunst aus der Bossierer-Werkstatt Stüdlin in Lohn, Schaffhausen.
Wyss, Robert L. (1956), Ein Tintengeschirr aus Winterthurer Fayence in Form eines Kirchenmodelles. In: Keramikfreunde der Schweiz, Mitteilungsblatt 34, 1956, 22–24.
Wyss, Robert L. (1973), Winterthurer Keramik. Hafnerware aus dem 17. Jahrhundert. Schweizer Heimatbücher 169–172. Bern.
Ziffer, Alfred (2005): Malerei und Feuerkunst. Fayencen der Sammlung Neuner. Wolfratshausen.